Université de Franche-Comté

Une médaille d'argent du CNRS…


(Suite)… En passant par deux intermédiaires : le carbone 14 (C14) et les cernes de croissance des arbres. Le C14 est un isotope, généré par les rayons cosmiques entrant en interaction avec les particules de la haute atmosphère. Plus l'activité du soleil est importante, plus elle dévie les rayons cosmiques et moins le C14 est formé dans l'atmosphère terrestre. Les cernes des arbres, eux, donnent une chronologie année par année. Grâce aux pins Douglas du continent américain ou à des chênes et des pins européens, une échelle chronologique, s'étalant sur 12 000 ans, a été établie. Il a ensuite été possible de corréler temporellement les informations fournies par les cernes des arbres et la quantité de C14, témoin de l'activité solaire. Ce résultat a été conforté par la mesure de la quantité de beryllium 10, un autre isotope cosmogénique présent dans les glaces des pôles. Preuve était ainsi faite que l'activité du soleil est le facteur déterminant des variations du climat sur les cycles séculaires, question controversée jusque dans les années 90.
• Comprendre plus précisément quels sont les différents forçages climatiques, déterminer les facteurs, naturels ou humains, influençant le climat…, la communauté des climatologues se penche sur ces questions. La collecte de données partout sur la planète dans des milieux disparates, la mise en place de marqueurs variés viennent alimenter des modèles sur le fonctionnement climatique qui permettent de se projeter vers l'avenir et d'envisager les évolutions futures. Ce que les paléoclimatologues et les climatologues découvrent alors, c'est que l'influence des facteurs anthropiques surpasse aujourd'hui celle des facteurs naturels. Pire encore : la configuration est telle que forçages naturels et anthropiques vont dans le sens d'un réchauffement : le soleil est dans une phase particulièrement active, tandis que la configuration orbitale de la terre dans le système solaire nous plonge dans un interglaciaire particulièrement long. Rien ne vient donc compenser le réchauffement dû à nos activités humaines.

Michel Magny a apporté sa pierre à la construction de ces connaissances par l'étude des sédiments lacustres de nos latitudes. Il a notamment mis au point une méthodologie fondée sur les analogues actuels : partant du principe que les différents paramètres étudiés varient toujours de la même façon du littoral vers le fond des lacs, il les détermine à la surface, pour ensuite extrapoler ses résultats aux sédiments récupérés par les carottes.
• Actuellement, ses travaux au sein du laboratoire de chrono-écologie s'attachent à comprendre comment les ressources en eau vont évoluer avec le réchauffement. Il tente également de documenter avec une résolution très fine tout le dernier millénaire, pour déterminer si les températures d'été connues au cours des années 90 sont exceptionnelles ou si elles sont identiques à celles de l'an 1000. Une autre voie des recherches du laboratoire consiste à diversifier les marqueurs pour gagner en précision et en résolution. À titre d'exemple, c'est à Besançon qu'a été soutenue la première thèse française sur les chironomes. Cette famille d'insectes laisse une trace de sa présence dans les sédiments sous la forme de capsules céphaliques résistantes à la décomposition. Or, les espèces de chironomes qui se développent sur un site changent en fonction de la température moyenne d'été. La répartition des différentes espèces et leur évolution dans le temps constituent donc un marqueur fin des températures. Enfin, le dernier axe des recherches auxquelles participe Michel Magny consiste à quantifier les variations des paramètres climatiques (températures moyennes d'été, d'hiver, précipitations annuelles…) grâce à des fonctions de transfert, en combinant assemblages polliniques, chironomes et niveaux des lacs.
• L'aventure scientifique à laquelle prend part ce paléoclimatologue est riche, et les résultats acquis au cours des trente dernières années amènent à s'interroger sur notre proche avenir : l'homme, par ses activités, détruit les grands équilibres naturels et devient responsable d'un réchauffement climatique dont les conséquences sont difficiles à apprécier, mais apparaissent pour le moins inquiétantes.

 

Michel Magny
Laboratoire de chrono-écologie
Université de Franche-Comté
Tél. 03 81 66 64 39
michel.magny@univ-fcomte.fr

 

 

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