Une imprimante 3D dotée d’un laser vert donne la possibilité à des spécialistes de la fabrication additive métal d’élaborer des pièces à base de cuivre d’une qualité inégalée, aux propriétés mécaniques et physico-chimiques remarquables. Un équipement unique en France, s’ajoutant aux moyens de la plateforme de microfabrication MIFHySTO.
Utilisée pour produire des dépôts en couches « épaisses », supérieures à 20 µm, la projection thermique compte au nombre des techniques de fabrication additive. C’est l’un des procédés dont s’est fait une spécialité le LERMPS, laboratoire historique de l’UTBM, aujourd’hui équipe de l’axe PMDM (Procédés métallurgiques, durabilité, matériaux) de l’ICB, le Laboratoire interdisciplinaire Carnot de Bourgogne.
Depuis plus de trente ans, les chercheurs, ingénieurs et techniciens du laboratoire élaborent des revêtements à base de céramiques, de polymères et de métaux sur des substrats très divers, grâce aux possibilités offertes par la projection thermique. Leur savoir-faire s’est adapté et décliné ensuite avec l’apparition d’une nouvelle technique de fabrication additive, l’impression 3D, dont le premier avantage est de rendre possible la création de pièces de géométrie complexe. La fusion sélective par laser sur lit de poudre métallique (SLM) est un procédé d’impression 3D que maîtrisent particulièrement les spécialistes du LERMPS : à l’état initial de poudre, un métal s’érige de manière solide au fur et à mesure qu’il est fondu par un faisceau laser, dont l’action sélective est pilotée par ordinateur à partir d’un modèle CAO. Résultat : une pièce fabriquée exactement selon la géométrie voulue.
L’acquisition récente d’une machine SLM à laser vert permet d’augmenter considérablement les performances des matériaux mis au point et utilisés pour ce procédé, dans le cadre d’applications industrielles ou à des fins de recherche. Le cuivre, conducteur électrique et thermique particulièrement intéressant pour de nombreuses applications industrielles, est l’un des métaux phares des investigations de l’équipe. Pur ou sous forme d’alliage, le cuivre présente la particularité de réfléchir intensément la lumière : une énergie importante est nécessaire pour pouvoir le fondre. La machine d’impression Trumpf TruPrint 1000 et son laser vert pallient cet inconvénient.
Christophe Verdy, Ludovic Vitu et Nouredine Fenineche, spécialistes de projection thermique et de fabrication additive au LERMPS, en sont des utilisateurs enthousiastes. « Le laser habituellement employé pour la fusion des poudres métalliques se situe dans l’infrarouge proche, à 1060 nm. Le cuivre absorbe trois fois plus l’énergie du laser vert, d’une longueur d’onde de 515 nm. » Fondus de façon beaucoup plus efficace, le cuivre pur comme les alliages sont de meilleure qualité, et leurs propriétés s’en trouvent renforcées. Leur densité avoisinant la perfection, 99,8 %, permet d’éviter de nombreux défauts intrinsèquement liés aux questions de porosité du matériau, qui devient ici très faible. La conductivité électrique du cuivre atteint 59,3 MS/m (mégasiemens par mètre), elle est même légèrement supérieure à celle d’un cuivre standard. Des parois plus étanches, des surfaces d’échange thermique plus importantes, des structures plus légères figurent parmi les gains qu’autorise cette technologie laser, dont les bénéfices concernent des applications dans tous les domaines, du biomédical à l’aéronautique¹ en passant par l’automobile ou l’horlogerie. « Le cuivre n’est pas le seul métal dont nous pouvons ainsi optimiser les performances en impression 3D ; d’autres métaux, et parmi eux des métaux précieux, également réfléchissants, présentent les mêmes comportements que le cuivre ; ils sont eux aussi susceptibles de connaître des améliorations inédites grâce à l’utilisation du laser vert. »
La Trumpf Tru Print 1000, telle qu’elle est installée comme ici dans une configuration complète, représente un procédé de fabrication additive unique en France ; il n’existe que 7 équipements comparables dans le monde entier. Cette machine vient s’ajouter aux moyens de microfabrication dont dispose la plateforme MIFHySTO2 sur le campus de l’UTBM à Sevenans. Elle s’apparente à un véritable saut technologique, d’autant plus qu’elle s’intègre à une chaîne de valeur maîtrisée de bout en bout par l’équipe, un savoir-faire rare à l’échelle internationale. « Nos équipements, nos compétences et notre expérience nous rendent performants à la fois dans l’élaboration d’alliages, le développement de procédés, la caractérisation des propriétés des matériaux et la production de pièces métalliques. » L’équipe assure par exemple la mise au point et la fabrication des poudres métalliques grâce à une tour d’atomisation que le laboratoire possède en propre. Cet équipement favorise les recherches sur de nouveaux alliages et permet de contrôler la composition des produits, en même temps qu’il garantit au laboratoire une indépendance totale d’approvisionnement. L’acquisition de la machine Trumpf représente un investissement de 404 000 euros, financé par le laboratoire ICB/PMDM/LERMPS et la région Bourgogne – Franche-Comté.