Université de Franche-Comté

Un lab-on-chip pour améliorer la fécondation in vitro


La fécondation in vitro (FIV) est encore une opération délicate : si les résultats varient d'un centre à l'autre,  le taux moyen de succès est voisin de 25 % (données nationales 2004 rapport annuel de l'Agence de la biomédecine), ce qui peut paraître faible au regard du parcours éprouvant que doivent accomplir les couples.
• Un des paramètres importants de ces techniques réside dans la sélection des ovocytes devant être micro-manipulés lors d'une micro-injection du spermatozoïde dans l'ovocyte (ICSI : Intra Cytoplasmic Sperm Injection). En effet, dans la reproduction humaine, les ovocytes suivent un processus de maturation nucléaire et cytoplasmique qui les rend aptes à être fécondés. Dans le cas de la FIV, il est primordial de pouvoir apprécier au mieux l'état de maturation des ovocytes prélevés. Actuellement, c'est principalement au microscope que les praticiens évaluent la qualité de l'ovocyte, selon des critères objectifs en ce qui concerne la maturité nucléaire, mais faisant en grande partie intervenir le savoir-faire et l'expérience du biologiste en ce qui concerne la maturité cytoplasmique. Une collaboration s'est mise en place entre  le centre d'AMP — assistance médicale à la procréation — du CHU de Besançon et l'équipe  biophotonique Ÿ du département d'optique de l'Institut FEMTO-ST pour objectiver le choix des ovocytes avec des techniques optiques. Il s'agit d'établir un catalogue de paramètres pertinents pour caractériser les propriétés de la cellule et de suivre l'évolution de ces derniers lors du développement initial in vitro de l'¶uf fécondé.
• De concert, les chercheurs ont décidé de réaliser un système intégré sur silicium où l'ovocyte allait pouvoir se déplacer d'un centre d'analyse à l'autre. Le premier verrou à lever était donc de faire se mouvoir la cellule, puis de l'immobiliser à des points précis. Après avoir tenté plusieurs solutions, le choix de l'équipe s'est porté sur un système microfluidique. L'ovocyte maintenu dans son milieu de culture est introduit dans un canal. Cette gouttière est percée tous les 2 mm d'ouvertures de 40 œm de diamètre, par lesquelles le liquide est aspiré, créant ainsi un courant qui met en mouvement l'ovocyte (sphère d'environ 150 œm de diamètre), et peut le maintenir en place en des points précis. La mobilisation des fluides a été effectuée à l'aide de micro-injecteurs habituellement utilisés en technique d'ICSI. Cette solution microfluidique a le mérite de permettre la mobilité de la cellule sans qu'il y ait un quelconque contact ou champ externe. Elle apparaît donc non délétère pour les gamètes et s'avère être d'une grande précision.

Exemple de déplacement d'ovocytes

Exemple de déplacement d'ovocytes

• Une fois la cellule maintenue à un endroit donné, restaient à mettre en place les techniques d'exploration. Deux capteurs optiques ont été conçus. Le premier permet de mesurer le pH des tuniques péri-ovocytaires grâce à une mesure de fluorescence. Un fluorophore est placé en bout de fibre optique, puis mis en contact avec la structure à analyser (un point important consiste à s'assurer que le fluorophore ne vient pas contrarier la cellule). Étant donné que la longueur d'onde de fluorescence dépend du pH du milieu, on a ainsi directement accès à l'information.
Le second capteur mesure l'absorption de l'ovocyte, grâce à une fibre optique émettrice, de 50 œm de c¶ur, qui envoie une lumière blanche à travers la cellule. Le signal est récupéré en sortie par une fibre collectrice de 100 œm de c¶ur. En comparant les spectres d'absorption des ovocytes à différents stades, ce poste d'analyse a déjà permis de discriminer les ovocytes matures des ovocytes immatures, de même qu'il rend compte du déroulement de la fécondation. Les premiers résultats de ce lab-on-chip sont donc prometteurs et les travaux se poursuivent par des études statistiques sur un grand nombre d'ovocytes pour quantifier les limites de ce procédé et déterminer la façon dont se comporte la cellule au cours du temps (y a-t-il un changement radical de l'absorption avant et après la fécondation ? Ou au contraire, les évolutions se font-elles de façon continue ?).
• L'innovation et l'utilité de ce nouveau laboratoire miniature, qui a nécessité quatre ans de travail pour voir le jour, ont été reconnues par le jury du salon Micronora, qui lui a décerné un micron d'or, mention  Prototypes microsystèmes réservés aux organismes de recherche Ÿ.

 

Christian Pieralli
Département LOPMD
Institut FEMTO-ST (UMR 6174)
Université de Franche-Comté / UTBM / ENSMM / CNRS
Tél. 03 81 66 63 88
christian.pieralli@univ-fcomte.fr

Christophe Roux
Génétique histologie biologie du développement et de la reproduction (EA 3185)
Université de Franche-Comté
Tél. 03 63 08 22 64
christophe.roux@univ-fcomte.fr

 

 

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