Mathématicien de formation, Augustin Cournot (1801-1877) oriente rapidement ses travaux vers la philosophie et l’économie. Il fait naître au croisement de ces disciplines des théories étonnantes, dérangeantes pour l’époque, ce qui explique en grande partie l’indifférence, le scepticisme voire le rejet dont font preuve ses contemporains.
Alors sous-estimée, l’œuvre du scientifique comtois révèlera toute son importance au siècle suivant, en particulier dans le domaine des sciences économiques, au point qu’elle en établira des fondements théoriques universels et toujours d’actualité.
L’ouvrage Cournot, économie et philosophie propose de revenir sur ces conceptions, à l’initiative de l’économiste Marc Deschamps et du philosophe Thierry Martin, chercheurs respectivement au CRESE et au laboratoire Logiques de l’agir, à l’université de Franche-Comté.
Leurs analyses se complètent de celles d’historiens des sciences et de sociologues pour mieux comprendre la dimension multiple que revêt l’œuvre de Cournot et se poser la question de sa pérennité, pour s’interroger sur la façon dont le mathématicien a élaboré des concepts qui se déclinent non seulement en économie, mais aussi en philosophie, en histoire des sciences, en écologie environnementale et dans la vie sociale et politique.
L’ouvrage majeur que signe Augustin Cournot en 1838, Recherches sur les principes mathématiques de la théorie des richesses, est au cœur de cet essai, parce qu’il est le premier à proposer une modélisation mathématique de mécanismes agissant sur des théories telles que la loi de l’offre et de la demande.
À sa parution, le livre est révolutionnaire. L’époque n’est pas encore à la modélisation, qui combine abstraction et preuve par l’expérimentation. Largement reconnues depuis, les méthodes énoncées dans les Recherches continuent à s’ériger en exemple, alors que la modélisation fait aujourd’hui partie intégrante du processus scientifique.
C’est l’un des aspects abordés dans Cournot, économie et philosophie, qui veut aussi plus largement cerner les interactions disciplinaires dans la pensée et le cheminement d’un scientifique à l’influence incontestable.
