Université de Franche-Comté

Simuler la croissance de structures nanométriques pour optimiser les conditions et les coûts de l'expérience


Dans la course à la miniaturisation des systèmes, on atteint maintenant les confins du monde classique, la taille des nouvelles structures créées pouvant aller jusqu'au nanomètre. Or, à cette échelle, le monde reste encore à apprivoiser, parce que les lois de la mécanique quantique dominent les propriétés physiques des objets fabriqués. Pour relever ce défi technologique, il est nécessaire de répondre à des exigences de qualité et de précision toujours plus grandes. De plus, compte tenu des coûts importants en nanosciences, ainsi que des temps inhérents à cette recherche, le tâtonnement n'est plus permis au niveau expérimental. Quels que soient les matériaux et les propriétés recherchés, des simulations numériques de l'expérience sont nécessaires pour choisir les espèces chimiques compatibles et pour optimiser les conditions expérimentales (température, pression, support, concentrations…).
• Actuellement, une piste prometteuse, notamment pour le développement de nanotechnologies liées au stockage de l'information, consiste à utiliser la géométrie de la surface sur laquelle sont déposés les atomes, pour former des structures contrôlées. Dans ce cadre, les chercheurs du laboratoire de Physique moléculaire de l'université de Franche-Comté ont mis au point un programme permettant de simuler  atome par atome Ÿ la croissance de nanostructures épitaxiées* par jet moléculaire. Ce programme est notamment capable de vaincre le problème crucial des échelles de temps, en ce qu'il peut gérer à la fois des phénomènes très rapides — les mouvements des atomes sont de l'ordre de la picoseconde —, et considérablement plus lents — les dépôts s'effectuent, eux, sur des durées de l'ordre de la milliseconde. Des fils de dimensions atomique et nanométrique, ainsi que des réseaux, ont donc pu être simulés au laboratoire. Une équipe de l'École polytechnique fédérale de Lausanne a permis d'observer la concordance avec des échantillons expérimentaux.

Pour cela, des surfaces préstructurées ont été utilisées comme support à la croissance des fils. En effet, certaines surfaces métalliques ou semi-conductrices peuvent être préparées de telle sorte qu'elles forment des successions régulières de marches, dont la hauteur est celle de la dimension d'un atome (environ 0,3 nanomètre). Cette structure prédéfinie de la surface agit alors comme un moule et les atomes viennent se déposer le long des marches pour constituer des fils atomiques. Ce type de projet demande en général une étroite coopération entre les physiciens théoriciens et expérimentateurs lorsque les systèmes étudiés sont complexes, dans la mesure où le nombre de combinaisons des matériaux de surface et des atomes adsorbés doit être réduit pour rendre l'étude fiable.
• À l'heure actuelle, l'équipe travaille à une généralisation de cette approche pour la rendre accessible à tout chercheur mais également pour former d'autres structures nanométriques (films minces contrôlés, alliages, fils moléculaires…). Pour cela, le laboratoire d'Informatique de l'université de Franche-Comté a apporté son soutien pour mettre les programmes à disposition via une interface web et un lancement à distance sur une grappe de PC, à l'aide de DIET — Distributed Interactive Engineering Toolbox. Il s'agit d'une plate-forme de metacomputing destinée à la résolution de problèmes de grande taille via internet, qui joue un rôle de middleware (ou intergiciel) entre les différents protagonistes. De telles simulations prenant beaucoup de temps — parfois plusieurs jours —, la parallélisation du programme a aussi été envisagée pour obtenir un temps d'exécution moins important. La plate-forme rend possible la réalisation de deux thèses à distance, l'une en cotutelle entre l'université de Monastir (Tunisie) et l'université de Franche-Comté, l'autre avec le pôle universitaire de Djibouti.

* Il s'agit d'une technique de dépôt de couches minces sous ultra-vide.

 

Christophe Ramseyer
Laboratoire de Physique moléculaire
(UMR 6624)
Université de Franche-Comté
Tél. 03 81 66 64 82
christophe.ramseyer@univ-fcomte.fr

 

 

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