Université de Franche-Comté

Rodolphe Boudot distingué pour ses travaux sur les horloges atomiques

Photo Ludovic Godard – UFC

 

 

Chercheur CNRS au département Temps-Fréquence de l’Institut FEMTO-ST, Rodolphe Boudot reçoit le prix EFTF (European Frequency and Time Forum) Young Scientist Award 2020.

Cette distinction internationale particulièrement reconnue dans la communauté du Temps-Fréquence récompense le chercheur pour ses travaux novateurs et sa contribution essentielle au développement d’horloges atomiques miniatures.

Des années de recherche, le travail d’une équipe motivée et soudée, des avancées scientifiques significatives, c’est l’ensemble de ces dimensions que ce prix met en lumière.

 

 

 

Une seconde = 9 192 631 770 batte­ments de l’atome de césium

Depuis 1967, ce n’est plus le mouvement naturel des astres autour de la Terre qui définit la seconde, unité de mesure du temps, mais l’atome de césium. La seconde correspond au temps écoulé pour voir l’atome de césium battre 9 192 631 770 fois entre les deux niveaux d’énergie de son état fondamental. Une définition qui met la planète entière au diapason : les atomes, dont le comportement est régi par les lois fondamentales de la physique, sont à l’origine du développement d’horloges aux performances de stabilité et d’exactitude exceptionnelles. La seconde est ainsi, et de loin, la grandeur physique mesurée avec le plus de précision. Les horloges atomiques répondent aux besoins récurrents en positionnement, géolocalisation ou synchronisation de domaines tels que les télécommunications, les transports, la défense ou le spatial. La spécificité des activités de recherche menées depuis une douzaine d’années par Rodolphe Boudot et son équipe à l’Institut FEMTO-ST consiste en la mise au point d’horloges atomiques compactes ou miniatures, susceptibles d’être un jour embarquées au fond des océans pour la détection de signaux sismiques ou exploitées à bord de récepteurs GNSS pour la navigation par satellite. Leur conception tout optique permet de supprimer la cavité micro-onde habituellement placée au cœur des horloges atomiques, et donc de réduire les dimensions.

Photo Ludovic Godard – UFC

Atomes piégés dans un état de super­position quantique

Le cœur de ces horloges est une cellule, possiblement microfabriquée dans un assemblage de verre et silicium, dans laquelle des atomes de césium, sous forme de vapeur, interagissent avec un signal micro-onde fourni par un oscillateur local. Sous l’influence d’un champ optique laser bifréquence, les atomes de césium sont piégés dans un état de superposition quantique dit CPT, acronyme anglais pour piégeage cohérent de population. Dans cet état particulier se produit une réduction subite d’absorption des photons lumineux par les atomes, et par conséquent une augmentation de la puissance lumineuse transmise à travers la cellule. Il devient alors possible de détecter un signal de résonance indiquant le décalage entre la fréquence du signal émis par l’oscillateur local et la fréquence propre des atomes, et mettre ainsi à profit cette valeur pour assujettir l’une à l’autre : la stabilité des atomes est ainsi transférée au signal utile délivré par l’oscillateur local.

 

Une stabilité de fréquence 100 fois supérieure

Malgré des performances déjà remarquables, la dégradation de la stabilité de fréquence des horloges CPT sur le long terme restait une limite à laquelle se heurtait la communauté de ce domaine scientifique. Les travaux récemment impulsés par Rodolphe Boudot ont pour la première fois permis de lever ce verrou majeur. « Les effets de déplacements lumineux, traduisant la sensibilité de la fréquence d’horloge aux variations de puissance ou de fréquence du champ laser, induisaient une dégradation de la stabilité de fréquence de l’horloge pour des temps de mesure supérieurs à quelques centaines de secondes. En appliquant une nouvelle méthode d’interrogation impulsionnelle des atomes, nous avons réussi à réduire par deux ordres de grandeur la contribution de ces effets, conduisant à une stabilité relative de fréquence atteignant 2 10-15 à 10 000 s, cent fois supérieure à celle qui prévalait auparavant », explique le chercheur.

La preuve de concept a été établie sur une horloge CPT compacte, et cette avancée importante laisse augurer bien des développements. L’une des prochaines étapes, qui fait d’ores et déjà l’objet d’un projet financé par l’Agence nationale de la recherche, sera de réussir à reproduire ce procédé dans une horloge CPT miniature. Avec une stabilité améliorée à long terme, ajoutée à ses autres atouts, encombrement de l’ordre de 15 cm3, consommation de 150-200 mW, potentiel de développement vers des applications grand public, la micro-horloge ne devrait pas manquer de continuer à susciter l’engouement des industriels.

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