Université de Franche-Comté

Recherche arctique en Franche-Comté


Paul-Émile Victor, Claude Lorius*… La Franche-Comté a une tradition de la recherche polaire. Et cette tradition trouve ses héritiers au sein du laboratoire ThéMA — théoriser et modéliser pour aménager — de l'université de Franche-Comté.
• En effet, ce laboratoire de géographie a fait renaître de ses cendres la base française du Spitsberg, cette langue de terre située dans la mer de Barents, à égale distance entre le nord de la Norvège et le pôle Nord**. En 1973, Thierry Brossard et Daniel Joly, deux jeunes chercheurs de Besançon, partent au Spitsberg pour leurs recherches. En 1979, le GDR — groupe de recherche —  Arctique Ÿ est constitué par le CNRS. Depuis lors, les expéditions françaises n'ont cessé de se succéder, gérées par l'institut Paul-Émile Victor, jusqu'à atteindre cette année une importante reconnaissance : l'ANR a décidé de soutenir un programme de recherche porté par ThéMA***. Le Spitsberg est en partie recouvert par les glaces les mois d'hiver. En été, la toundra, avec sa faune et sa flore spécifiques, reprend ses droits. La base française est localisée dans la partie nord-ouest de l'archipel, à quelques kilomètres de la ville minière de Ny-Ålesund (qui est devenue une station scientifique internationale), au pied des glaciers Loven-Est. Parce que l'eau de ces glaciers est contrainte et s'écoule dans deux canyons parfaitement identifiés et accessibles aux mesures, ce site constitue un cas d'école pour qui veut étudier les dynamiques hydrologiques d'un glacier.
• Comment l'eau circule-t-elle dans le système ? Quel est le bilan des apports et des sorties en eau ? Comment évolue le glacier au cours du temps et comment réagit-il au réchauffement climatique ? Telles sont les questions auxquelles s'attelle le programme Hydro-Sensor-Flows (Flux of Water and Sediments).
• Deux voies permettent de déterminer la variation de volume d'un glacier. La première consiste à établir le bilan de masse (voie glaciologique), la seconde cherche à définir le bilan d'écoulement (voie hydrologique) en soustrayant de ce qui arrive dans le glacier (neige, pluie…) tout ce qui en ressort (lame d'eau, de fonte de la neige et de la glace, évaporation…). Le programme s'attache à la seconde méthode, ce qui est rendu possible par l'emplacement exceptionnel du site.
De très nombreuses informations sont nécessaires pour déterminer les différents paramètres de l'équation, des données météorologiques qu'il faut collecter et spatialiser (radiation, air, précipitations, vitesse du vent et direction, accumulation de neige, fonte de glace…), ce qui suppose de déterminer aussi le comportement du permafrost par des méthodes géophysiques, l'évolution des deltas et la sédimentation côtière (par des mesures à distance et in situ).

• Tout un ensemble de capteurs, répartis à des points stratégiques du glacier, va donc permettre d'avoir des mesures en continu, pendant quatre ans, qui seront mises en relation avec celles obtenues de façon ponctuelle depuis quarante ans sur ce glacier et avec les mesures météorologiques continues depuis 1969 de la station de Ny Ålesund. L'objectif est de comprendre l'importance des eaux dans la dynamique générale des marges polaires soumises à un retrait des glaces accéléré depuis les années 70.
Ainsi, le système de capteurs est composé de deux stations météorologiques complètes, trois limnigraphes (avec des sondes multiparamètres), trois préleveurs d'eau automatiques, trente capteurs thermiques pour la température de l'air, neuf anémomètres-pluviomètres et dix caméras automatiques****.
L'acquisition d'images en continu se justifie par l'extrême rapidité des changements intervenant sur le glacier, notamment au printemps.
• L'ensemble des données ainsi collectées, après analyse, viendra conforter, affiner ou infirmer le modèle de fonctionnement hydrologique du glacier établi d'après les observations antérieures. Il apportera ainsi de l'eau au moulin des recherches sur le climat, en étudiant son impact sur un environnement certes restreint, mais particulièrement réactif aux changements.

* Qui, le premier, a étudié l'air emprisonné dans les glaces.

** Ce bout de terre norvégienne est situé entre 74° et 81° de latitude nord et entre 10° et 34°de longitude est.

*** Ce programme, pluridisciplinaire et international, est soutenu par l'institut Paul-Émile Victor (IPEV) et le conseil régional de Franche-Comté. Des chercheurs français, allemands, espagnols et russes y participent, que ce soit en hydrologie, géomorphologie, géophysique ou sédimentologie.

**** La mise au point des caméras a fait l'objet d'une collaboration avec l'institut FEMTO-ST(département LPMO). Celui-ci a été chargé de développer un réseau prenant en continu des images du glacier. Les emplacements des caméras ont été déterminés par un programme informatique pour couvrir toutes les zones, sans point mort.

 

Madeleine Griselin
Laboratoire ThéMA
Université de Franche-Comté
Tél. 03 81 66 59 51
madeleine.griselin@univ-fcomte.fr

 

 

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