Université de Franche-Comté

Quand notre cerveau nous joue des tours…

Notre attention peut-elle se mobiliser sur deux pensées à la fois ? A-t-on une perception juste de ce que l’on voit ? Quels cheminements suit la mémoire visuelle ? Ces questions ont toutes pour objet d’étude le fonctionnement de notre système cognitif. Elles sont au centre des recherches menées par André Didierjean, nommé à l’Institut universitaire de France en octobre dernier, directeur du laboratoire de psychologie de l’université de Franche-Comté et responsable du pôle Comportement, risques, santé de la MSHE.

 

 

« Lorsque vous entendez un son, dites le plus vite possible s’il est grave ou aigu ; lorsque vous voyez une lettre, appuyez sur cette touche. » Cette petite expérience, très révélatrice, est répétée en faisant varier de mille à quinze millisecondes l’intervalle de durée entre les stimuli : plus on rapproche les signaux, le son et l’image, plus le temps de réponse au second stimulus est long. Conclusion : on ne peut traiter deux tâches à la fois ; la deuxième est « mise en attente » le temps que la première soit traitée.

 

Des études ont par ailleurs démontré qu’une limitation mentale est imposée par notre cerveau, une sorte de goulet d’étranglement n’autorisant le traitement que d’une seule information à la fois. Un bon entraînement pourrait-il avoir raison de ce verrou ? De récents travaux menés par André Didierjean et ses collègues ont mis en évidence que si des résultats dans ce sens peuvent être obtenus, la réussite est cependant soumise à certaines conditions : l’entraînement, comportant des milliers d’essais, doit porter sur la seconde tâche à réaliser ; la réponse aux stimuli être verbale et non pas motrice ; les sujets être jeunes. Sous ces conditions il devient alors possible d’effectuer deux tâches avec la même rapidité et en même temps.

 

Panda en peluche sur escalier pour test de mémoire visuelle

 L’image vue à gauche, après mémorisation, est retranscrite à droite avec une extension du champ,

un phénomène provoqué par notre connaissance de ce qu’est un escalier

 

 

Mieux vaut y regarder à deux fois…

Autre croyance à remettre en cause : la justesse de notre regard… Si l’on présente à deux reprises à un individu la photographie d’un objet, par exemple une bouteille sur une table, il aura l’impression que les deux images sont différentes. Son souvenir de la première sera en plan plus large. Parce qu’il a en mémoire des connaissances sur ce que sont une table, un mur, perçus en fond, l’observateur va automatiquement « enrichir » son souvenir de « plus de table », « plus de mur »… De ce fait, si on lui présente à nouveau la photographie, il la trouvera en plan plus serré que celle dont il se souvient.

 

Selon ce principe, imaginons l’image d’une fusée puis une autre représentant un poids pour balance. Les objets sont centrés, pourtant notre cerveau gardera en mémoire des images toutes deux faussées : la fusée, que l’on sait devoir s’élever vers le ciel, est placée à tort plus haut sur l’image ; le poids, connu pour être lourd, est situé trop bas…

 

Pour mieux évaluer l’influence de nos connaissances, des travaux comparent, pour un même domaine, des experts et des novices. Dans une recherche réalisée par André Didierjean et ses collaborateurs, des pilotes de chasse et des spectateurs inexpérimentés sont invités à visionner l’atterrissage d’un avion vu depuis le cockpit. Le film présenté est suspendu pendant 250 millisecondes, puis repart exactement de l’endroit où il s’est arrêté. Les néophytes ont bien fixé la dernière image et reprennent sans étonnement le cours du film. Les pilotes, eux, ont l’impression que le film a été « reculé » : ils ont anticipé la poursuite d’un scénario qu’ils connaissent parfaitement bien et leur cerveau a enregistré des images encore non visualisées…

 

Les travaux menés par André Didierjean seront favorisés par sa nomination à l’Institut universitaire de France pour cinq ans, grâce à des fonds spécialement dédiés et une décharge d’enseignement qu’il consacrera entièrement à l’objet de ses recherches.

 

 

Contact : André Didierjean

Laboratoire de psychologie

Université de Franche-Comté

Tél. (0033/0) 3 81 66 51 92

 

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