Université de Franche-Comté

Quand la physique quantique trouve des applications dans la cryptographie


Jean-Marc Merolla a reçu la médaille de bronze du CNRS 2004. Cette distinction est décernée à un jeune chercheur pour la qualité et la richesse de ses travaux.
• Intégré à l'équipe GTL − Georgia tech Lorraine − CNRS Télécom du département d'Optique de FEMTO-ST de l'université de Franche-Comté, qui s'intéresse aux télécommunications sur les aspects débits, routage et sécurisation, Jean-Marc Merolla travaille à la conception d'une méthode expérimentale de cryptage quantique.
• Actuellement, les codes de cryptage de l'information reposent principalement sur la théorie des nombres (par exemple l'utilisation des nombres premiers). La sécurité de tels systèmes est liée au décalage entre le code utilisé et la puissance de calcul nécessaire à son  craquage Ÿ. Ils ne sont donc pas théoriquement inviolables.
À partir des années 90, des équipes ont développé de nouvelles méthodes de cryptage s'appuyant sur un principe physique de mécanique quantique, le principe d'incertitude d'Heinsenberg qui postule que l'on ne peut connaître simultanément avec le maximum de précision toutes les données descriptives d'un système quantique (toute mesure produit une modification de l'état mesuré). L'inviolabilité devient intrinsèque ou contenue dans la théorie. Ces méthodes s'appliquent ici aux communications par fibre optique, dans lesquelles la lumière, et donc les photons, sont porteurs de l'information. L'avantage des photons est qu'ils ne peuvent être réceptionnés par plusieurs personnes. Si on les compare à une balle lancée à grande vitesse, la seule façon de lire le message porté par la balle est d'attraper celle-ci. Alice transmet une clé de cryptage constituée d'un certain nombre de photons à Bob.

Un espion, s'il ne veut pas être découvert, ne peut intercepter toute la clé mais seulement quelques photons. Bob n'utilisera que les photons non interceptés par l'espion pour constituer une clé certes réduite, mais connue de lui seul. En indiquant la position des photons non interceptés à Alice, ils pourront définir une clé finale secrète qui leur permettra de chiffrer et déchiffrer les messages en toute confidentialité.
• Si le principe peut paraître trivial, il n'en est rien dans la réalisation. Cette nouvelle discipline qu'est la communication quantique procède à la fois de la physique théorique, de la théorie de l'information (développement d'algorithmes de traitement…) et de la physique expérimentale (notamment électronique). À chaque niveau, les conditions qui garantissent le secret doivent être respectées.
• Concrètement, deux principales techniques ont été mises au point dans les années 90, en amont du travail de l'équipe GTL du laboratoire FEMTO-ST. L'une consiste à polariser les photons, il faut alors utiliser des systèmes annexes de contrôle et de maintien de cette polarisation. L'autre s'appuie sur de grands retards temporels optiques pour coder chaque bit transmis (à raison d'un photon par bit). Ces retards doivent être maintenus avec précision, ce qui implique de fréquents réglages et donc une réduction du débit moyen. Pour contourner ces problèmes, l'équipe utilise, elle, l'interférométrie non plus temporelle, mais spectrale (les impulsions sont de longueurs d'onde différentes). Cette nouvelle méthode introduit une bien meilleure stabilité. L'autre avantage, et non des moindres, est que ses outils pourraient être transposables sur des composants optiques intégrés. Des brevets internationaux ont été déposés. Le projet est au stade du transfert de technologie. L'objectif est d'obtenir des puces qui puissent coder l'information directement à l'entrée des fibres optiques.

 

Jean-Marc Merolla
FEMTO-ST (CNRS UMR 6174)
Département d'Optique
Université de Franche-Comté / UTBM / ENSMM
Tél. 03 81 66 64 09
merolla@georgiatech-metz.fr

 

 

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