Université de Franche-Comté

Quand la mécanique vient en aide aux athlètes pour améliorer leurs performances


Le biathlon, discipline olympique combinant le ski de fond et le tir à la carabine, fait largement intervenir, notamment pour l'épreuve de tir, des aspects techniques, posturaux et psychologiques. Et parfois les athlètes ne peuvent s'expliquer un tir manqué. Cette situation, bien souvent non reconnue par les entraîneurs, induit une déstabilisation psychologique. Des chercheurs de l'équipe biomécanique du LMARC − laboratoire de Mécanique appliquée Raymond Chaléat − de l'université de Franche-Comté ont cherché des causes mécaniques à ces tirs ratés, surtout pour soutenir les athlètes, les aider à dénouer leur part de responsabilités et ainsi améliorer leur confiance en eux.
• Lors d'une épreuve de biathlon, outre l'échauffement physique, une phase consiste à régler les éléments de visée de la carabine en fonction des conditions du moment (climatiques, configuration du pas de tir…). Encore faut-il posséder des munitions qui réagissent toutes de la même façon. La Fédération française de ski (biathlon) opère donc un tri des cartouches directement chez le fournisseur, en testant différents lots de fabrication. Quelques balles issues d'un même lot, qui en comporte environ 5 000, sont tirées. L'objectif est de sélectionner les tirs les plus groupés possible, signe que les projectiles sont homogènes. Cette première sélection est donc totalement empirique.
Le travail de l'équipe de biomécanique a consisté à l'améliorer considérablement en amenant des preuves expérimentales puis théoriques. Pour cela, il a fallu analyser et comprendre le comportement des munitions lors du tir, et donc lors de leur passage dans le canon de l'arme.
• Le biathlon se pratiquant le plus souvent dans des gammes de températures allant de 0 à – 10 °C, le minimum étant de – 20 °C, une chambre climatique a été conçue pour effectuer les essais. La carabine a été maintenue par un système, mis au point au laboratoire, reproduisant d'aussi près que possible les conditions de maintien par un être humain. Ces essais se sont déroulés à une distance de 50 m (règlement biathlon) grâce à un champ de tir mis à la disposition du LMARC par l'autorité militaire.

Trois paramètres ont ainsi pu être analysés : le boîtier de détente avec la queue de détente, la balle, puis le rapport balle / canon. Des capteurs enregistraient la force de recul, la déformation que subit le canon suite au passage de la balle, la vitesse de la balle en sortie du canon (dite vitesse de bouche) et la température de celui-ci. Cette première série de mesures, qui a duré 6 mois, a permis de modéliser le comportement du projectile. Elle a mis en évidence une température critique aux alentours de – 3 °C, pour laquelle les groupements sont dégradés à cause d'une transformation de l'atmosphère interne du canon.
• Les tests ont ensuite été poursuivis avec deux athlètes* au repos d'abord, puis à l'exercice. À chaque tir, étaient mesurées la force de l'épaulée, la force de recul (force de réaction au moment du tir), la vitesse de bouche et la force exercée sur la queue de détente au seuil de déclenchement. Ces analyses et modélisations ont permis d'évaluer certains comportements entre l'athlète et sa carabine et de coupler les caractéristiques d'un projectile avec celles d'un canon. Si les résultats précis sont maintenus secrets par un contrat de confidentialité liant le laboratoire et la Fédération française de ski, il est néanmoins possible de révéler que la technique élaborée par l'équipe permet de faire un tri supplémentaire de 60 % des projectiles. Et que l'utilisation de ceux-ci a dès à présent permis aux athlètes de gagner en moyenne une balle par compétition en coupe du monde, ce qui représente environ un gain de 20 places au classement des épreuves. Mais surtout, elle lève une ambiguïté pour les athlètes qui peuvent sereinement prendre confiance en eux et améliorer leurs performances en connaissance de cause.

 

Alain Burtheret – Christelle Grebot
Laboratoire de Mécanique appliquée R. Chaléat
Université de Franche-Comté
Tél. 03 81 66 60 40 – Fax 03 81 66 67 00
alain.burtheret@univ-fcomte.fr

 

 

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