Université de Franche-Comté

[Psychologie socioculturelle]

Ouvrir la réflexion autour de la vie des personnes âgées

« Il existe autant de manières de vieillir que de vivre… » Soucieuse de déconstruire les stéréotypes souvent associés aux seniors, entre jeunisme à tout prix et fatalisme du déclin, la psychologue Tania Zittoun montre qu’on peut réinventer nos façons de penser, et considère que l’environnement physique et social joue un rôle important sur le vieillissement.

Logements HomAge – Crédits photo Voltolini architecture Sarl

Dans le projet HomAge1 qu’elle a récemment piloté à l’université de Neuchâtel, Tania Zittoun poursuit ses travaux en psycho­logie socioculturelle concernant l’adaptation des personnes âgées à de nouvelles conditions de logement.
La recherche a été menée à l’échelle du canton de Neuchâtel, alors que l’État fédéral oriente sa politique vers une meilleure prise en charge des seniors, notamment par la construction d’immeubles dotés d’appartements « avec encadrement ».

L’entrée en institution, le dé­ménagement dans un autre logement, pour les personnes les plus autonomes, ou encore l’accompagnement à domicile : ces changements signifient s’approprier un nouvel espace de vie ou reconsidérer celui qu’on a connu, et prendre d’autres habitudes. « Cela crée des occasions d’apprentissage et de développement que nous documentons à travers nos travaux », explique Tania Zittoun.

1 Projet mené en collaboration avec Fabienne Gfeller, chercheure en post-doctorat à l’UniNE, et Michèle Grossen, professeure honoraire de l’université de Lausanne. HomAge a bénéficié d’un financement du Fonds national suisse.

 

Mise en scène de situations réelles

Afin de partager le fruit de leur travail et de faciliter les échanges entre les acteurs concernés, personnes âgées, proches aidants, soignants, responsables d’institutions, élus, les chercheuses se sont adjoint les talents d’un auteur de théâtre, également anthropologue, pour mettre en scène deux scénarios parmi les plus fréquemment rencontrés : dans le premier, une dame veuve depuis peu s’installe dans un appartement avec encadrement ; dans le second, la dame choisit de rester dans sa maison contre l’avis de ses enfants, et bénéficie de l’aide d’un réseau informel, voisins, facteur, livreur…

Crédits photo Liora Zittoun – Pièce de théâtre Staging Age II

« Les pièces de théâtre demandent qui, en définitive, opère les choix de vie des personnes âgées, et comment cette réalité est vécue. » La mise en scène de situations du quotidien aide aussi le public, essentiellement des professionnels et des proches aidants, à prendre conscience des problèmes, et pointe la nécessité de procéder à certains ajustements dans l’équipement ou l’encadrement à disposition.

Une autre rencontre, baptisée « Vivre chez soi », a donné l’occasion d’orienter la réflexion autour de solutions de logement comme la colocation ou les coopératives intergénérationnelles, ou sur la création de maisons de quartier pour personnes âgées, autant d’initiatives qui aident à rester à domicile en encourageant le lien social. « L’étude est menée à l’échelle cantonale, mais les problèmes se posent ailleurs de la même façon. Des initiatives locales intéressantes méritent d’être valorisées pour en inspirer de similaires à d’autres endroits. Et un regard extérieur met en évidence certains questionnements. Par exemple, on se rend compte que dans beaucoup de décisions prises au niveau institutionnel, les personnes âgées, pourtant les premières concernées, ne sont pas consultées. »

Conserver des liens avec le passé

Quels que soient le lieu et la manière de vivre l’avancée en âge, pouvoir conserver une part de ce qui a fondé la vie passée est très souvent essentiel.

Photo congerdesign – Pixabay

C’est continuer de voir un paysage qu’on a toujours connu et apprécié, garder une activité, au moins partiellement, que ce soit faire la cuisine ou s’engager au service d’une cause. C’est aussi transformer une expérience de vie qu’on ne peut poursuivre, en récit qu’on peut partager… « Prendre ces aspects en considération s’avère encore plus important dans le cas d’un déménagement », souligne Tania Zittoun.

La psychologie socioculturelle apporte des réponses particulières à la problématique du vieillissement.
Pour mieux les faire connaître, les travaux de l’équipe neuchâteloise feront l’objet d’une valorisation de plus grande envergure avec la création, à l’horizon 2025, d’une nouvelle pièce de théâtre, cette fois à destination du grand public.

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