La planète est impactée par des événements extrêmes toujours plus fréquents et plus graves, d’ordre climatique comme les inondations ou les tempêtes, de nature géologique comme les tremblements de terre ou les tsunamis, auxquels il faut bien ajouter des phénomènes devenus chroniques comme les sécheresses, l’élévation du niveau des mers ou la fonte des glaciers.
Toutes ces manifestations « naturelles » provoquent, ou sont susceptibles de provoquer des catastrophes humaines et économiques au sein de sociétés devenues par ailleurs plus fragiles devant de telles circonstances, principalement en raison de l’urbanisation, de l’industrialisation, ou encore du vieillissement des populations exposées. Ce constat implique la nécessité de faire de la gestion des risques une priorité, du niveau local à l’échelle internationale.
C’est là tout l’enjeu de l’IRN (International Research Network) RISCDIS, qui implique des chercheurs au Japon, au Canada, aux États-Unis et en France1. Ce projet est coordonné par l’historien Emmanuel Garnier, directeur de recherche CNRS au laboratoire Chrono-environnement. « L’objectif est de mieux évaluer les risques en s’appuyant sur les expériences du passé et sur les analyses de la science, et de promouvoir cette connaissance pour une meilleure résilience des sociétés. »
Sur cette base, le projet a également pour ambition de renforcer les capacités de réponse des institutions chargées de la gestion des risques, et d’aider à la coordination des stratégies à mettre en œuvre. Différentes problématiques significatives, dans les pays impliqués, serviront de références pour nourrir la recherche, des rives du Saint-Laurent au Canada à la faille de Nankaï au Japon, de la côte est des États-Unis aux vallées alpines de France.
Le site de Fukushima, victime d’un séisme et d’un tsunami responsables de l’accident nucléaire que l’on sait, représente dans ce contexte une étude de cas d’intérêt majeur. Emmanuel Garnier rappelle ainsi que la digue érigée sur le littoral avait été conçue pour résister à des vagues de 10 m de hauteur. « Cet ordre de grandeur était jugé maximal, alors que le tsunami a fait naître des vagues de 15 m, voire 30 m localement. La prise en compte d’épisodes d’ampleur similaire, produits en d’autres endroits, aurait pu apporter des informations importantes pour anticiper le risque. »
Les répercussions de la tragédie posent aussi question. Aujourd’hui le gouvernement japonais estime qu’il n’y a plus de radioactivité à Fukushima, quand les compteurs Geiger des experts étrangers indiquent le contraire. Aux alentours du site, à proximité des habitations, des tonnes de terre radioactive sont de façon dérisoire dissimulées sous des bâches. Les forêts ne sont plus exploitées, faute de bras, et parfois c’est même interdit, mais lors des typhons, les vents font tomber les arbres, dont certains sont réputés pour fixer la radioactivité : abattus, ils sont dès lors susceptibles de la diffuser, des années après l’accident.
« La compréhension des causes et des conséquences de catastrophes telles que celle de Fukushima, et l’étude des épisodes extrêmes qui leur sont liés, fournissent matière à analyse et à réflexion ; il est important de transmettre les connaissances que l’on peut tirer de ces expériences au monde scientifique comme au grand public, pour une prévention et des actions concertées, et les plus éclairées possible. »