Université de Franche-Comté

Pour réduire les frottements mécaniques, un procédé de projection thermique de polymères a été mis en place

Dans un processus d'amélioration des performances des systèmes mécaniques, mais surtout pour contribuer à la préservation des ressources naturelles, des recherches sur la réduction des frottements ont été développées. Sur une idée originale consistant à modifier les conditions de contact des lubrifiants avec les pièces mécaniques, la technique de projection thermique a été utilisée pour déposer des  couches de polymères sur des surfaces métalliques. Les compétences académiques régionales ont été mobilisées, sous la forme d'une collaboration entre le LERMPS — laboratoire d'Études et de recherches sur les matériaux, les procédés et les surfaces — de l'université de technologie de Belfort-Montbéliard (UTBM), expert en projection thermique, et le LMS — laboratoire de Microanalyse des surfaces — de l'École nationale supérieure de mécanique et des microtechniques (ENSMM), spécialiste de la tribologie.

• Le frottement dû au déplacement relatif de pièces mécaniques lubrifiées peut s'avérer très important et engendrer une perte d'énergie conséquente dissipée sous forme de chaleur. Jusqu'alors, l'objectif principal des revêtements développés pour réduire le frottement entre des pièces mécaniques est de diminuer le niveau de frottement lorsque le contact entre celles-ci est sec. Très peu de revêtements sont développés dans le but de réduire le frottement entre les pièces lorsque le système fonctionne dans un régime de lubrification hydrodynamique où le film de lubrifiant est censé s'interposer entre les surfaces et les séparer complètement. Il n'existe donc pas de contact direct entre les pièces. Toutefois, des études préliminaires ont montré que dans ce régime de lubrification, il était  possible de réduire le frottement, malgré la présence du film d'huile, par un nouveau type de revêtement polymère. Beaucoup ont été testés, tels que le graphite, sous toutes ses formes, le bisulfure de molybdène ou encore l'étain, mais peu d'entre eux ont conduit à une réduction significative du frottement. De plus, la plupart de ces solutions utilisent la pulvérisation, à partir de solvants, de résines qui sont ensuite polymérisées à chaud, procédés peu éco-compatibles.

• Les travaux des équipes de recherche ont porté sur des alliages légers (ou tout autre matériau métallique) dont toute ou partie de la surface est recouverte par un dépôt de polymère PEEK (Poly éther ethercétone) déposé par projection thermique. Les mesures de frottement, faites tout d'abord sur des éprouvettes de laboratoire puis sur un ensemble mécanique complet, ont démontré une baisse du niveau de frottement de l'ordre de 20 % sur l'ensemble de la plage de fonctionnement du système concerné. Ce revêtement pourrait permettre, en outre, compte tenu des propriétés relativement élevées du dépôt obtenu, de réduire l'usure des pièces décrites.

• Concrètement, une poudre de polymère PEEK de granulométrie moyenne de l'ordre de 25 œm est utilisée. La taille de la poudre est un élément très important pour l'obtention d'un dépôt aux caractéristiques de frottement recherchées. En effet, plus la taille est importante plus la fusion est délicate et plus le revêtement final est grossier, avec, de plus, une épaisseur difficile à contrôler. À l'inverse, une taille trop petite pourrait entraîner une carbonisation des poudres. La poudre de polymère PEEK est projetée avec une torche à plasma dont la température peut être contrôlée, par exemple en plaçant un thermocouple sur la pièce, celle-ci ayant été chauffée au préalable. Les pièces à symétrie de révolution sont mises en rotation en face de la torche. Suivant les performances du dépôt que l'on souhaite obtenir après projection, on réalisera un refroidissement contrôlé ou non. Dans le cas d'un refroidissement à l'air, le dépôt obtenu est semi-cristallisé et possède une dureté Vickers de l'ordre de 25 Hv 10. Au contraire, pour obtenir une couche amorphe, il suffit de tremper la pièce dans l'eau après projection. Ces derniers dépôts ont la particularité d'être transparents et présentent une dureté de l'ordre de 13 Hv 10. Ce type de dépôt ne nécessite pas de cuisson finale, ce qui limite la température de traitement et surtout sa durée. Le temps de préchauffage ainsi que la température sont réglés de façon à obtenir un dépôt adhérent tout en ne modifiant pas les propriétés mécaniques du substrat par ce traitement thermique  non désiré Ÿ. Une première campagne de mesures de frottement a pu mettre en évidence l'intérêt de ces revêtements de polymères PEEK projetés à la torche à plasma. Les résultats obtenus ont montré que le frottement en régime hydrodynamique, où un film d'huile s'interpose entre les pièces frottantes, est fortement réduit par rapport à tous les revêtements alternatifs disponibles à ce jour. Des travaux ultérieurs ont mis en évidence que la cristallinité du revêtement de polymère, sa rugosité et ses caractéristiques de mouillabilité en regard de l'huile utilisée pouvaient également participer à améliorer les performances d'un tel dépôt. Les études se poursuivent afin d'optimiser les paramètres de dépôts, de telle sorte que le gain de frottement soit encore plus conséquent que celui obtenu à ce jour.

 

Guy Monteil
LMS
École nationale supérieure de mécanique
et des microtechniques de Besançon
Tél. 03 81 40 28 67
guy.monteil@ens2m.fr

Christian Coddet
LERMPS
Université de technologie de Belfort-Montbéliard
Tél. 03 84 58 30 23
lermps@utbm.fr

 

 

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