Université de Franche-Comté

Nouveau jeu de construction moléculaire pour la connectique

nanofils

Image artistique représentant la structure des nanofils obtenus sur une surface de chlorure de potassium

Imaginez une chaîne composée de plusieurs maillons, posée sur une surface. Immobile, cette chaîne s’allonge au fur et à mesure que d’autres maillons disposés aléatoirement sur la surface viennent s’y accrocher. Cette configuration à peine imagée est celle de la construction de nanofils de polymère à partir de molécules, selon une méthode pluridisciplinaire et totalement inédite 1. Directeur de recherche CNRS à l’Institut FEMTO-ST, Frédéric Chérioux est l’un des artisans-bâtisseurs de ce savant et imperceptible montage. Son expertise en chimie a été mise à profit dans ce projet des plus ambitieux, également investi par la simulation numérique et la microscopie à force atomique.

« C’est la première fois qu’une polymérisation en chaîne est réalisée à cette échelle sur une surface. Elle est obtenue à température ambiante grâce à de la lumière ultraviolette qui provoque la réaction de polymérisation. » Agissant sur une configuration moléculaire au départ désordonnée, la surface oriente les particules de façon à créer un fil à la structure parfaitement organisée ; les lois de la thermodynamique expliquent par ailleurs que le fil croît d’autant plus facilement qu’il gagne en longueur, au point d’atteindre des dimensions inespérées. « Ces fils à la géométrie irréprochable sont sans défaut, une condition nécessaire pour qu’ils conservent des propriétés physiques optimales ; cela s’est vérifié même après plus de deux mille réactions élémentaires. »

Pour visualiser la progression, la disposition et la manipulation des molécules, la microscopie à force atomique, capable d’observer un atome isolé sur une surface, est la méthode d’observation par excellence d’un fil dont les dimensions, 5 nm de large par 1000 de long, feraient paraître énorme un cheveu posé à côté. 5 nm, c’est la taille idéale pour ces nanofils chargés d’établir des connexions entre composants électroniques, et c’est aussi réduire de moitié la taille des fils aujourd’hui proposés par l’industrie : un encombrement minimum pour augmenter la densité des composants, et ainsi assurer une performance accrue des dispositifs. Et 1 μm de long, c’est multiplier par 20 la longueur actuelle des fils les plus longs, et donc faciliter leur manipulation.

La démonstration de principe du mécanisme de croissance des nanofils, obtenue par l’expérimentation et validée par la simulation numérique, a fait l’objet d’une parution dans la prestigieuse revue scientifique Nature Chemistry en août dernier. L’étape suivante consistera à rendre les nanofils fonctionnels. De chaque côté de l’épine dorsale qui constitue leur structure, des molécules « neutres » pourraient en effet être dotées de différentes fonctions, magnétiques, optiques… Des développements à venir, sur la base de ce que Frédéric Chérioux qualifie de « beau succès pluridisciplinaire ».

1 L’équipe est constituée de chercheurs de l’Institut FEMTO-ST, de l’Institut matériaux, microélectronique, nanosciences de Provence (IM2NP), et de l’université de Lincoln (Angleterre)

Contact(s) :
Institut FEMTO-ST UFC / ENSMM / UTBM / CNRS
Département MN2S
Frédéric Chérioux
Tél. +33 (0)3 63 08 24 25
frederic.cherioux[at]femto-st.fr
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