Université de Franche-Comté

Mise au point d’un appareil de mesure in vivo des propriétés physiques de la peau humaine : l’extensiomètre

Les propriétés mécaniques des matériaux, étudiées depuis longtemps par les chercheurs et les ingénieurs, font partie des connaissances fondamentales qui permettent de comprendre le comportement des matériaux ou de les utiliser de façon pertinente. Ces mesures, qui sont courantes pour les métaux, les polymères ou les composites, le sont moins pour les matériaux biologiques. Toutefois, de nombreuses recherches sont réalisées depuis longtemps sur la peau humaine et ses constituants.

•  La peau est un organe complexe dont la fonction ne se limite pas à celle d’une simple barrière physique contre les agressions extérieures ; elle est aussi un organe transitionnel qui communique et échange avec autrui et l’environnement. Les dermatologues et cosméticiens ont besoin de comprendre et de contrôler l’effet des traitements appliqués sur la peau. Ce contrôle est aujourd’hui souvent réalisé de façon qualitative, ce qui conduit à une vérification plus ou moins objective. Il apparaît donc nécessaire de quantifier avec précision l’évolution d’au moins une caractéristique représentative de l’état et du comportement de la peau, et qui soit, en outre, sensible aux actions extérieures. Si les moyens de ce contrôle peuvent être relativement sophistiqués quand les études ont lieu en milieu hospitalier ou dans un laboratoire de recherche, ils doivent être simples tout en étant performants pour le praticien qui intervient dans son cabinet. "Les sciences physiques n’ont pu progresser qu’à la faveur du développement des méthodes de mesure… C’est aussi le cas de la recherche cosmétologique où les critères d’innocuité et d’efficacité en raison de leur finesse deviennent inaccessibles à l’observation et nécessitent pour leur mise en évidence et leur suivi le recours à des mesures instrumentales" : dans ces lignes, Pierre Agache professeur honoraire en dermatologie à l’université de Franche-Comté, souligne l’importance de la mesure précise, et partant, la nécessité de concevoir des appareils à la fois simples et performants pour les médecins.

•   Les moyens actuellement disponibles sur le marché sont peu nombreux et d’une technologie souvent ancienne. Le LMARC ― laboratoire de Mécanique appliquée Raymond Chaléat ― de l’université de Franche-Comté, dont l’un des sujets de recherche porte sur l’étude des propriétés mécaniques de la peau, a ainsi mis au point un dispositif d’essai unidirectionnel de traction ou compression. Cet appareil, baptisé extensiomètre, permet d’appliquer sur la surface de la peau, entre deux patins, une sollicitation qui peut être contrôlée en effort ou en déplacement. 

• Un goniomètre permet à l’utilisateur d’effectuer des tests dans toutes les directions afin d’étudier l’anisotropie de la peau. Les mesures de l’effort, du déplacement et des champs de déplacements ou déformations sont assurées en temps réel. Différents aspects ont particulièrement été étudiés pour que cet appareil soit novateur, précis et d’un emploi aisé. La liaison avec la peau, facteur prépondérant de qualité, est réalisée grâce à un dispositif par succion original qui permet une liaison simple, efficace, non invasive et facile à mettre en oeuvre. Ce système de liaison permet de s’affranchir des défauts liés à l’utilisation de colle rapide ou de papier collant double face. Les dimensions sont réduites grâce à l’emploi de micromoteurs à courant continu, de capteurs de déplacement miniatures et de capteurs de force à jauges semi-conductrices intégrés dans la structure de l’appareil. Le déplacement symétrique des patins de part et d’autre d’une zone d’observation totalement libre permet de coupler ce dispositif à différents capteurs en fonction des besoins de l’utilisateur : caméra pour analyse d’image, dispositif optique de mesure du relief cutané, sonde ultra-sonore pour la mesure des propriétés du derme profond… Cet instrument fait appel à des technologies modernes aussi bien du point de vue de la mécanique que de l’électronique ou de la commande. Ses procédés originaux, utilisés et validés, en font un appareil moderne qui devrait permettre aux essais mécaniques de trouver leur place au sein des méthodes d’investigation utilisées par les dermatologues ou les cosméticiens.

•   Ce projet a été mené à bien dans le cadre d’une large collaboration, regroupant, autour du LMARC, le laboratoire de Tribologie et dynamique des systèmes de l’École centrale de Lyon, l’Institut de recherche Pierre Fabre de Toulouse (IRPF), le Centre Pierre Vernier de Besançon. Cette étude, réalisée en grande partie par un doctorant boursier du ministère de l’Éducation nationale avec le soutien financier de l’IRPF, a donné lieu à un brevet déposé par le partenaire industriel (le dépôt est en cours).

 

Jean-Michel Lagarde
Développement nouveaux appareils
Institut de recherche Pierre Fabre
Centre Jean-Louis Alibert
31025 Toulouse cedex 3
Tél. 05 62 48 85 00
jean-michel.lagarde@pierre-fabre.com

Daniel Varchon
Laboratoire de mécanique appliquée
Raymond Chaléat
Université de Franche-Comté
Tél. 03 81 66 60 14
daniel.varchon@univ-fcomte.fr

 

 

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