Université de Franche-Comté

[Milieu hospitalier]

Améliorer la logistique pour produire moins de déchets médicaux

Photo Thomas G. – Pixabay

Pour des raisons de sécurité sanitaire essentiellement, le recours aux dispositifs médicaux à usage unique s’est généralisé dans le domaine de la santé au début du XXIe siècle. En Suisse, cette évolution a été guidée par l’ordonnance sur les dispositifs médicaux (ODIM) de 1996. L’adoption de cette pratique donne nécessairement lieu à une augmentation du volume des déchets, une situation qu’un groupe de chercheurs de la Haute Ecole Arc a souhaité mieux cerner, avec le concours d’un hôpital universitaire d’envergure nationale.
« En 2022, l’activité de l’hôpital a généré près de 4 300 tonnes de déchets, ce qui représente environ 12 tonnes chaque jour », raconte Karine Doan, spécialiste de la Supply Chain Management, coresponsable à la HE-Arc du projet HOSP-ECO¹.

L’ambition est d’optimiser la gestion des dispositifs médicaux et ainsi de réduire la production des déchets, dont près de 60 % sont incinérés, répartis en déchets industriels (48,8 %), médicaux (9,4 %) et chimiques (1,1 %), et 40 % sont valorisés via les filières papier /carton, bois, métaux…

Fin 2023, au terme d’enquêtes de terrain menées sur plus d’une année auprès des différents acteurs concernés et de modélisations permettant d’établir une cartographie des flux, l’équipe a rendu son rapport et émis ses recommandations. L’étude montre notamment qu’entre l’achat des dispositifs et l’évacuation des déchets, qui sont à chaque bout de la chaîne des processus bien identifiés, il n’y a que très peu de visibilité sur le parcours suivi par le matériel. Le constat est à nuancer pour les blocs opératoires, où les stocks sont gérés de manière informatisée ; il est sans équivoque pour les services de soins, où se constituent partout de petits stocks dont on ne sait dire au final par quel service ou pour quels soins ils ont été utilisés. Impossible avec ce schéma de fonctionnement de constituer une base de données en vue de les traiter et de proposer des solutions. Mais d’autres leviers d’action sont possibles. « Un modèle tel que l’analyse du cycle de vie offre par exemple une solution pour évaluer les impacts écologiques réels des déchets médicaux et guider les décisions vers une gestion plus durable. »

Le rapport met aussi en évidence la primauté du point de vue financier : les gestionnaires privilégient l’incinération par rapport aux filières de revalorisation, qui recyclent les déchets en toute sécurité mais s’avèrent plus coûteuses. « Le personnel est sensible à la question environnementale, mais dans une structure aussi grande et hiérarchisée, où les cultures métier sont aussi différentes, il est difficile d’échanger des idées. La communication entre les services est une priorité pour pouvoir améliorer la situation. » Et au-delà de la sphère de l’hôpital, les chercheurs soulignent l’intérêt d’impliquer toutes les parties prenantes, les fournisseurs notamment. « Ils sont concernés par le packaging des produits aussi bien que par les questions de transport. Ils font déjà des efforts, et il est important de travailler encore plus avec eux en amont. »

Entre pratiques de soins, habitudes de travail, principe de précaution, contraintes techniques et intérêts financiers, les questionnements se posent à différents niveaux de la chaîne avec de potentielles solutions à la clé, qu’une seconde étude pourrait avantageusement explorer.

 

¹ HOSP-ECO a été mené de façon interdisciplinaire par des chercheurs des domaines gestion, santé et ingénierie de la HE-Arc, qui a financé le projet. Gestion : Karine Doan et Patrick Ischer ; Santé : Olivier Walger et Josepha Girard ; Ingénierie : Stefano Carrino et Alexis Maire.
Contact(s) :
Haute Ecole Arc Gestion
Karine Doan
Tél. +41 (0)32 930 23 36
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