Université de Franche-Comté

Les ondes gravitationnelles font vibrer le monde de la science

Einstein avait prédit leur existence il y a tout juste un siècle, mais les pensait indétectables. Les progrès de l’interférométrie laser lui ont donné raison et tort : les ondes gravitationnelles existent bel et bien, elles ont été captées, mesurées et caractérisées par des interféromètres d’une sensibilité incroyable, des équipements inimaginables à l’époque de la théorie de la relativité.

rapprochement et fusion de deux trous noirs - vue d'artiste -

Rapprochement et fusion de deux trous noirs, l’un des phénomènes astrophysiques responsables de l’émission
d’ondes gravitationnelles. Vue d’artiste – Crédits : NASA/CXC/GSFC/T. Strohmayer

Les ondes gravitationnelles représentent la propagation, à la vitesse de la lumière, de perturbations de l’espace, induisant d’infimes variations de distances sur leur passage ; elles sont produites par tout objet massif dont le mouvement s’accélère à un moment donné dans l’Univers. Les ondes enregistrées en septembre dernier par les deux interféromètres de la collaboration LIGO1 proviennent du rapprochement puis de la fusion de deux trous noirs. Issues d’un phénomène cataclysmique où les masses en jeu représentent plusieurs dizaines de fois celle du Soleil, ces ondes ont mis la bagatelle de 1,3 milliard d’années à parvenir jusqu’à nous, provoquant des distorsions de longueur de l’ordre de 10-18 mètres, c’est-à-dire quatre millièmes du diamètre d’un proton.

Pour ne pas passer à côté d’ondes aussi difficilement perceptibles, les interféromètres laser déploient deux bras immenses, de plusieurs kilomètres de long : c’est à cette condition que l’infime variation de longueur différentielle des bras, témoignant de façon caractéristique de l’impact d’une onde gravitationnelle, pourra être mesurée par les lasers.

Éric Genin a préparé sa thèse au département d’optique de l’Institut FEMTO-ST sous la direction de Laurent Larger. Il travaille aujourd’hui à l’Observatoire gravitationnel européen qui gère le dispositif Virgo2, un interféromètre installé en Italie à proximité de Pise. Un autre dispositif est basé en Allemagne, un autre est en construction au Japon, un autre encore en projet en Inde. « L’intérêt d’un tel réseau est de partager les données pour une analyse fine de ces micro-événements et de mieux localiser leur source par recoupement d’informations », explique Éric Genin.

Améliorer la sensibilité des interféromètres est le challenge technologique qui conditionne la réussite de la mesure des ondes. « Nous travaillons à augmenter la précision des lasers comme à réduire les bruits sismiques ou acoustiques qui risquent de perturber l’enregistrement du signal, raconte Éric Genin. Ces améliorations vont bientôt donner naissance à la deuxième génération de Virgo : Advanced Virgo sera opérationnel pour la prise de données à la fin de cette année ».

Défi technologique et enjeu cosmique

L’onde captée par les interféromètres sur le sol américain représente un double événement. Timothée Accadia, alors étudiant à Annecy-le-Vieux, a réalisé sa thèse de doctorat en physique des particules dans Virgo. Il a depuis rejoint l’équipe Temps-Fréquence de l’OSU-THETA à Besançon. Il explique avec enthousiasme que « l’observation de cette onde constitue aussi la première preuve directe de l’existence des trous noirs ».

Les ondes gravitationnelles ouvrent une nouvelle fenêtre d’observation de l’Univers. À l’inverse des ondes électromagnétiques, elles n’interfèrent quasiment pas avec les milieux dans lesquels elles se propagent : pour elles, la Terre est transparente, comme les autres objets placés sur leur route céleste. Le fait que les ondes sont très peu absorbées lors de leur propagation signifie qu’elles sont susceptibles de provenir de très loin dans l’espace et dans le temps… et de nous faire remonter jusqu’à leur origine, voire aux tout premiers instants de l’Univers. L’apport des ondes gravitationnelles serait complémentaire à celui de l’astronomie optique telle qu’on la connaît depuis toujours. « Leur exploitation nous donnerait la possibilité, par comparaison, de rendre plus fiables certains résultats, de découvrir des objets aujourd’hui indécelables dans l’Univers et d’observer des phénomènes de façon inédite », conclut le jeune chercheur.

 

1LIGO : Laser Interferometer Gravitational-Wave Observatory

https://www.ligo.caltech.edu/detection

2Virgo : http://public.virgo-gw.eu

L'interféromètre européen Virgo est installé en Italie, à proximité de Pise.

Vue aérienne, crédit Virgo Collaboration

Vue aérienne de l'interféromètre Virgo à Pise

 

Contact :

Éric Genin

Observatoire gravitationnel européen

Tél. +39 (0)50 752 369

Timothée Accadia

OSU-THETA Franche-Comté – Observatoire des sciences de l’Univers de Besançon

Université de Franche-Comté

Tél. +33 (0)3 81 66 69 23

 

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