Depuis le début des années 1990, le groupe de Mycologie du laboratoire de Microbiologie de luniversité de Neuchâtel étudie, en collaboration avec des partenaires spécialisés et lindustrie, les mécanismes développés par les champignons supérieurs (Basidiomycètes) pour former leurs fructifications et se défendre contre les compétiteurs (bactéries et moisissures). Lintérêt principal de cette recherche est de comprendre le rôle des facteurs trophiques (cest-à-dire liés à la nutrition des tissus) et environnementaux dans le déclenchement du processus de fructification et dans la compétitivité (agressivité) des souches de champignons. Au cours de ces phénomènes, des molécules actives, potentiellement intéressantes pour la pharmacologie ou la cosmétologie, sont synthétisées. Il sagit alors de les identifier.
• Les recherches du groupe portent principalement sur les aspects suivants : – la sélection despèces ciblées en fonction de leur écologie (saprophytes primaires, secondaires ou parasites facultatifs), de leurs qualités gustatives (intérêt gastronomique) ou de leur utilisation dans les médecines populaires ou traditionnelles – la production de substrats de culture appropriés à partir de déchets de lagriculture, ainsi que le développement de substrats pour lindustrie alimentaire "bio" – létude du cycle de vie et des conditions environnementales requises pour la fructification (température, humidité, flux dair, CO2, lumière), afin détablir des techniques culturales rapides, économiques et reproductibles en vue dune production industrielle – lanalyse de la modulation morphologique au sein dune espèce (forme, grandeur, couleur, goût) par des facteurs trophiques et environnementaux – létude par des mesures spectrométriques (AAS, CS, ICP-MS) de lincorporation des métaux (fer, zinc, cuivre) et dun métalloïde (sélénium) dans les fructifications, ainsi que de leur localisation dans le mycélium (EDAX, PIXE). Connaissant les mécanismes dincorporation des métaux dans les champignons supérieurs, il devient possible dobtenir des fructifications contenant des oligo-éléments essentiels et donc pouvant être homologuées comme de la nourriture fonctionnelle, ou de sélectionner des souches en vue de la décontamination de sites pollués par des métaux lourds
• – lobtention dextraits bruts (extraction à lacétate déthyle et méthanol) à partir des fructifications. Si, par des tests biologiques, la présence de substances actives, en particulier des composés antibactériens, antifongiques et antiradicalaires est mise en évidence dans ces extraits, ceux-ci sont fractionnés et les molécules actives sont isolées par chromatographie (en couche mince, sur colonne ou en phase inverse) et caractérisées par résonance magnétique nucléaire. Le génome des souches est également analysé au moyen des techniques de biologie moléculaire (PCR et RFLP) pour le corréler avec leur agressivité et leur comportement face à des conditions trophiques et environnementales stressantes.
• Jusquici, la formation de fructifications et loptimisation des procédés de culture à léchelle industrielle ont été obtenues pour 36 espèces de Basidiomycètes*. Sachant que la culture in vitro des champignons est différente et plus ou moins difficile dune espèce à lautre, on peut mesurer lampleur du travail effectué. Les extraits bruts dune vingtaine de ces champignons possèdent des effets antiradicalaires, bactéricides et/ou fongicides. Certains dentre eux ont été fractionnés et les principes actifs isolés et caractérisés. Deux molécules issues des fructifications développées dans le laboratoire sont actuellement testées au niveau industriel et une partie importante des recherches du groupe sur la culture des champignons comestibles est déjà exploitée commercialement.
Fructification de Pholiota nameko en culture industrielle
Daniel Job – Michel Aragno
Laboratoire de Microbiologie
Institut de botanique
Université de Neuchâtel
Tél. 41 32 718 23 27
daniel.job@unine.ch