Université de Franche-Comté

Le management coopératif au service du développement du territoire

Des méthodes d’analyses et de conduite de projets nées à Besançon irriguent toute l’Europe

Besançon, première ville à avoir mis en place un revenu minimum garanti, a aussi été l’une des villes pilotes pour l’introduction du RMI. En 1988, la mode n’était pas à l’évaluation, pourtant un laboratoire de l’université de Franche-Comté — à l’époque le MTI, devenu depuis le Pôle Intelligence territoriale de ThéMA — a été chargé de mesurer les besoins des bénéficiaires du RMI et les réponses que les structures sociales leur apportaient. Ce projet inaugurait vingt ans de recherches sur ce qui est devenu « l’intelligence territoriale », ou comment penser et analyser de façon systémique, à plusieurs échelles du territoire, le jeu des acteurs, dans l’objectif de le voir se développer durablement.

 

 

 

L’art de faire travailler les gens ensemble

Si cette étude a apporté des bénéfices, c’est bien en montrant que les réponses apportées en termes d’aide sociale perdaient en acuité de par leur sectorisation. Les près de 500 dossiers étudiés se caractérisaient par une grande complexité des situations que les structures d’aide ne reflétaient pas, les services du logement, de la santé, de l’emploi étant complètement étanches les uns par rapport aux autres. La nécessité de faire travailler les équipes ensemble s’est donc révélée primordiale pour l’efficacité des politiques sociales, et par là, le mieux-être des populations en difficulté.

 

C’est à cette tâche que s’est attelé le laboratoire, en abordant le problème scientifiquement, c’est-à-dire en mettant en place une méthodologie précise, adossée à des outils issus des technologies de l’information et de la communication.

 

 

 

Etablir un diagnostic dans le temps et l'espace

L’ADAPEI — Association des amis et parents de personnes handicapées mentales — a en charge l’aide et l’insertion de la personne handicapée mentale tout au long de son parcours de vie. Elle est constituée d’une vingtaine d’établissements ayant chacun des compétences différentes : l’insertion par le travail, les foyers de vie, l’accompagnement social et professionnel. Si les établissements sont distincts, géographiquement éclatés, ce sont par contre les mêmes personnes qui sont prises en charge. Un outil de suivi dans le temps — parfois le temps d’une vie entière — des services apportés aux handicapés permettrait de cibler les actions, d’éviter les redondances, d’évaluer l’efficacité de l’ADAPEI… Cet outil existe, il s’appelle OSUA et est actuellement installé dans une phase de test.

 

Pour le développer, l’ADAPEI a sollicité le MTI, poursuivant ainsi une collaboration qui dure depuis plus de dix ans, dans le cadre de projets européens. OSUA repose sur plusieurs socles. L’aspect technique est primordial, car il s’agit de gérer une base de données intégrant dans le temps une quantité très disparate d’informations, couvrant tous les domaines de la vie des malades (loisirs, médical, travail…).

 

Mais le plus difficile est peut-être de formaliser la structure de cette base de données. Or, qui mieux que les travailleurs intervenant au quotidien dans les établissements peuvent définir ces besoins ? C’est là que le management participatif intervient conjointement à l’expertise de ThéMA. Depuis 2005, des représentants de chaque domaine de l’ADAPEI se sont retrouvés pour rendre le plus exhaustif et le plus cohérent possible le logiciel développé. Quelles informations doivent figurer ? Sous quelle forme ? Quelles sont celles qui doivent rester secrètes ? Le Pôle Intelligence territoriale accompagne le groupe de travail, en aidant à la formalisation du projet, en pointant les écueils à éviter, dans le cadre de la méthode CATALYSE, de leur invention.

 

 

Vue de la zone économiquement sinistrée de Seraing

 

Vue de la zone économiquement sinistrée de Seraing

 

 

 

Des experts exportés

Depuis 1988, les recherches de MTI ont conduit à ce dispositif, CATALYSE, de nombreuses fois éprouvé, en même temps que co-construit au fil des projets menés. Car la méthodologie s’est exportée en Andalousie (Huelva, Espagne) pour évaluer et mieux prendre en compte les populations défavorisées, notamment de Gitans ; en Belgique (Seraing), dans une zone économiquement sinistrée ; à Taïwan, pour mettre en place une véritable politique territoriale à l’occasion de l’implantation ex nihilo d’un parc scientifique censé générer 50 000 emplois par an.

 

À chaque fois, la méthode CATALYSE permet de ne pas se perdre dans la complexité de la situation, tout en la prenant en compte. Diagnostic précis faisant intervenir les SIG — Systèmes d’informations géographiques ; modalités d’actions décidées par les partenaires (pouvant aller jusqu’à cinquante) ; évaluation de celles-ci… Si les outils mis en œuvre sont globaux et systémiques, les actions, elles, sont au contraire très concrètes. À Seraing, ce sont des ateliers de lutte contre l’illettrisme participant à une meilleure autonomie des habitants, relevée comme une problématique majeure. À Huelva, c’est une carte « sociale » qui permet de se rendre compte que les fils de Gitans relogés dans des HLM retournent souvent dans les quartiers de leur enfance, faute de travail et donc de revenus suffisants…

 

 

 

Un réseau d’intelligence territoriale

Les différents partenaires du Pôle Intelligence territoriale sont, depuis 2006, réunis au sein d’un réseau tout à fait officiel et tout à fait européen — la CaENTI —, financé par le 6e PCRDT de la Commission européenne, qui a réuni 250 chercheurs et acteurs (dont 124 étrangers et 30 non européens) à Besançon en octobre. Lors de cette dernière conférence de la CaENTI, contact a été pris avec des chercheurs canadiens et sud-américains pour engager la construction d’un réseau international.

 

 

Contact : Jean-Jacques Girardot

Laboratoire ThéMA

Université de Franche-Comté

Tél. (0033/0) 3 81 66 51 56

 

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