Université de Franche-Comté

L’adaptation des échanges gazeux en cours d’exercice

Contrairement à ce qui peut être lu dans les manuels de physiologie, la consommation d’oxygène (VO2) ne dépend pas essentiellement de l’intensité de l’exercice : elle évolue aussi en fonction de la durée. L’organisme contracte en effet toute une série de déficits (eau, nutriments, minéraux…). Mais le déficit essentiel qui doit être nécessairement apuré dans les plus brefs délais correspond à un déficit en oxygène contracté par les fibres musculaires.

• Il convient donc de distinguer plusieurs phases dans les premiers temps de l’exercice : après la première phase qui ne dure que 15 secondes environ, c’est au cours de la suivante que VO2 augmente de manière exponentielle avant de parvenir à un état stable après 2 à 3 minutes. La mesure de VO2 reflète ainsi l’énergie produite pour assurer le travail musculaire. Si l’exercice se déroule à une haute intensité, une phase 3 peut être observée : cette phase est dite de composante lente par opposition à la phase rapide d’augmentation du début de l’exercice. La signification de la phase rapide et de la composante lente de la cinétique de VO2 n’est pas encore clairement établie. L’objectif du travail ici présenté a consisté à préciser la nature des mécanismes physiologiques qui induisent ces différentes phases d’ajustement de VO2 pour des exercices à allure constante.

• L’étude a d’abord porté sur la phase 2 pour tenter de répondre à une question restée sans réponse depuis plus d’un demi-siècle : le temps de retard entre l’énergie produite et l’exercice musculaire imposé s’explique-t-il par une limitation dans la capacité de transport de l’oxygène vers les muscles ou une limitation du muscle à utiliser cet oxygène ? L’hypothèse relative à la perfusion des muscles actifs a été testée grâce à un dispositif original qui, à partir d’un système d’occlusion des membres non-actifs, apporte artificiellement plus d’oxygène aux membres actifs. En utilisant ce dispositif sur des petites masses musculaires les résultats ont montré que l’ajustement de VO2 des muscles actifs était limité par les capacités de transport de l’oxygène aux cellules dans les premières minutes de l’effort.

• L’étude a ensuite été consacrée à l’exploration de certains mécanismes sous-jacents de la phase de composante lente. Comment peut-on expliquer que l’organisme dépense plus d’énergie pour faire un même travail musculaire ? Une première expérience a consisté à manipuler systématiquement le régime d’action musculaire connu pour avoir une incidence sur le recrutement sélectif des fibres musculaires. Dans une situation d’action musculaire excentrique (bicyclette ergométrique entraînée par un moteur) aucune composante lente n’a pu être identifiée pour des charges de travail identiques réalisées sur bicyclette ergométrique conventionnelle. Une autre expérience a porté sur le recrutement progressif des fibres de type rapide à mesure que les fibres lentes arrivent à l’épuisement. L’activité électrique des muscles actifs a donc été enregistrée de façon rigoureuse pour déterminer quel type de fibres était sollicité : treize coureurs à pied bien entraînés ont couru à une intensité élevée jusqu’à épuisement, soit environ pendant 10 minutes. Il s’avère qu’il existe une coïncidence quasi-parfaite entre l’élévation de VO2 et la dérive des signaux électriques musculaires vers les hautes fréquences ; ce qui montre l’influence du type de fibres impliquées dans l’effort lors de la composante lente.

• Ce travail a permis aussi de dégager une quatrième phase dans la cinétique d’ajustement de VO2 pour des intensités d’effort élevées : diverses expériences démontrent que pour plus de 50 % des athlètes une baisse de VO2 est observée juste avant l’épuisement. Ce phénomène curieux suggère que l’organisme économise de l’énergie pour les besoins des muscles respiratoires.

• Cette étude, de dimension nationale et internationale, présente l’originalité d’avoir développé des dispositifs qui ont permis d’étudier les mécanismes de contrôle de VO2 à l’effort. Deux échanges auront lieu cet été au sein des équipes française et canadienne et prolongeront cette collaboration. La Région de Franche-Comté a apporté son soutien à ce travail sous la forme d’une allocation de recherche.

 

Stéphane Perrey
Laboratoire des Sciences du sport
Université de Franche-ComtéTél. 03 81 66 56 81Fax 03 81 66 56 92
stephane.perrey@univ-fcomte.fr

 

 

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