Université de Franche-Comté

La Grèce antique en héritage

Temple d’Athéna Nikè, Acropole, Athènes. Photo Esarnika – Pixabay

Les identités et cultures européennes ont toutes dans leur ADN un peu de la Grèce antique. Trouver les origines de cet héritage commun, comprendre comment et pourquoi il s’est transmis, connaître les enjeux qu’il porte aujourd’hui sont les axes de recherche du projet européen GrECI1, né de l’intérêt de chercheurs pour un constat paradoxal : cette filiation que nul ne conteste n’a pas d’explication claire. L’excellence culturelle de la Grèce antique ne saurait seule en justifier la réalité, une hypothèse qui a guidé le travail des chercheurs jusqu’aux débuts de l’Europe moderne.

« Le XVIe siècle est fortement marqué par la réception de la Grèce antique », explique Marie Barral-Baron Daussy, enseignante-chercheuse en histoire moderne à l’uFC / Centre Lucien Febvre, responsable du projet à l’université. « Paris est alors la capitale de l’hellénisme et, grâce à la protection royale, une organisation universitaire et éditoriale de haut niveau éclot, qui donne naissance à une première génération d’hellénistes français. Des textes grecs originaux sont imprimés pour la première fois, par des imprimeurs-érudits passionnés comme Adrien Turnèbe à Paris ou Aldo Manuzio à Venise2, et les grammaires se multiplient », témoigne à titre d’exemples la chercheuse, spécialiste de l’histoire des idées et de l’humanisme.

Étudier l’histoire du livre donne ainsi les moyens de mieux comprendre le rôle des écrits dans le rayonnement culturel de la Grèce antique au début de la période moderne. Les études linguistiques et littéraires, quant à elles, interrogent l’importance du grec dans l’émergence des cultures régionales en Europe, et la persistance du lien entre certains États modernes et la Grèce antique. Au XVIe siècle, la langue et les textes grecs sont également convoqués dans les débats confessionnels, notamment dans les conflits opposant catholiques et protestants : leur analyse montre la manière dont ils sont partie prenante de la construction des identités religieuses.

Le patrimoine matériel antique entre lui aussi en ligne de compte dans la maturation culturelle européenne : c’est le dernier volet exploré dans le projet. Une carte très complète recensera les régions et les monuments visités par les voyageurs de l’époque, en mentionnant l’impact que ces découvertes ont produit sur eux, à partir de leurs récits de voyage. L’analyse de ces processus historiques trouve un écho dans le monde d’aujourd’hui : c’est aussi la signification que revêt cet héritage commun pour les idées actuelles d’identité européenne que les chercheurs vont questionner.

 

1 Greek heritage in European Culture and Identity (GrECI). Projet Horizon Europe (2023-2025) piloté par les universités de Chypre, d’Oslo et de Franche-Comté.
2 Barral-Baron M., Kecskeméti J. Médecins des textes, médecins des âmes : Adrien Turnèbe et Guillaume Morel, éditions Brepols, 2020.
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