A-t-on bien la notion du temps ? Le temps tel qu’on le perçoit au sens ordinaire, et le temps tel qu’il est décrit par la physique contemporaine recouvrent des conceptions diverses, et souvent opposées. Ainsi la relativité restreinte, pour qui le temps s’écoule différemment selon le référentiel que l’on considère, est une théorie qui échappe à notre réalité, fondée sur le rythme immuable de l’horloge. Dans un contexte plus large, certaines interprétations influentes de la mécanique quantique développent une approche structuraliste de la matière, qu’elles regardent comme un réseau de relations entre particules, là où nous voyons prosaïquement un objet.
Enseignant-chercheur à l’Institut de philosophie de l’université de Neuchâtel, Fabrice Correia est spécialiste de logique et de métaphysique contemporaine. Il souhaite réconcilier le sens commun et la physique sur la conception du temps. « Les théories physiques nées depuis un siècle alimentent la discussion. Très abstraites, comportant pour certaines une bonne part de mathématiques, elles sont sujettes à interprétation. Il est intéressant de regarder si elles peuvent être compatibles avec le sens commun », explique-t-il. Une interrogation d’importance, car ne pas réussir à trouver de terrain d’entente signifierait que, « la science ayant en général le dernier mot, nous serions constamment dans l’erreur ! »
Pour étudier ces questions, Fabrice Correia vient d’obtenir un financement de 1,4 million de francs suisses sur cinq ans de la part du Fonds national suisse. Seuls quatre dossiers en sciences humaines et sociales, sur une centaine de demandes au total, ont été dotés par le FNS : le projet « Le temps et les occupants du temps » confirme l’excellence de l’université de Neuchâtel en ce domaine.
Fabrice Correia codirige le groupe de recherche eidos développé entre Neuchâtel et Genève qui, depuis huit ans, mobilise une quinzaine de spécialistes sur des projets ayant trait à la métaphysique et à d’autres disciplines de philosophie théorique.