Le bonheur est la source de nombreux questionnements, aussi bien chez les scientifiques que dans la pensée de tout un chacun et ce depuis l’Antiquité, comme l’attestaient déjà certains travaux de Socrate. Après un voyage à travers le monde et les époques, le sujet a cette fois inspiré Gaël Brulé, sociologue à l’université de Neuchâtel, dans son ouvrage Petites mythologies du bonheur français. Fort de ses expériences personnelles au-delà des frontières de l’Hexagone, l’auteur compare les comportements de ses compatriotes avec ceux qu’il a pu observer à l’étranger. Un nouveau défi pour l’auteur dont le premier succès Le bonheur n’est pas là où vous le pensez traitait la question du bonheur dans sa globalité.
Si plus de 90 % des Français se déclarent heureux, plaçant le pays à la 13e position à l’échelle européenne, le classement est moins prestigieux lorsque vient la question du niveau de satisfaction des individus à l’égard de leur vie, catégorie dans laquelle la France termine 25e sur 46. Une telle différence de rangs soulève des interrogations que le sociologue propose d’explorer à travers six objets du quotidien métaphoriquement porteurs de sens : le bouchon de vin et le rapport au passé, le « repas à la française » et l’hédonisme, la clôture dont on aime s’entourer pour se sentir chez soi et le rapport à l’inconnu, la classe d’école dans le « mille-feuille social », la 2 CV comme emblème de liberté et le journal comme symbole de création et de diffusion des idées. Les résultats des études semblent sans appel : si les Français sont en grande majorité satisfaits de leur propre vie, c’est un avenir commun qui les effraie. Pour être plus heureux, Gaël Brulé explique que les Français doivent apprendre à tisser des liens avec les individus qui les entourent, avec leur environnement, voire avec eux-mêmes, leur corps et leurs émotions, pour investir pleinement leurs libertés.
En effet, les racines révolutionnaires du peuple de l’Hexagone ont permis d’aboutir à davantage de droits, mais tous ne semblent pourtant pas donner lieu à des améliorations notables, créant une spirale infernale dans laquelle il est facile de se perdre. Si l’auteur signale que certains de ces maux ne sont pas spécifiques aux Français, ceux-ci devront cependant affronter leurs peurs pour oser faire émerger un nouveau récit de société inspiré de l’esprit des Lumières, plus proche des valeurs qu’ils prônent. Un véritable défi pour tout un peuple, avec plus de bonheur à la clé.