Université de Franche-Comté

Du gravier et des plantes pour filtrer des effluents industriels

Fabricant de papier pour cartons ondulés, la Papeterie du Doubs, appartenant au groupe OTOR, utilise du carton usagé (200 T/jour), de l’eau (35 m3/h) et de l’énergie (thermique et électrique). Soucieuse de préserver l’environnement, notamment en traitant l’eau usagée issue des process, elle a sollicité l’aide de l’université de Franche-Comté, de DNE ― Doubs nature environnement ― et de la DIREN ― Direction régionale de l’environnement ― pour mettre en place un système innovant de filtration de l’eau.

•  Les effluents de papeterie sont riches en matière organique en suspension ― fibres de cellulose du papier, amidon utilisé pour coller les caisses de carton ― mais ne contiennent pas de polluants toxiques comme des métaux lourds ou des encres non solubles. Au cours des traitements primaire et secondaire (décanteur primaire, suivi d’une lagune aérée et d’un décanteur final), les fibres de papier sont récupérées et recyclées dans le process, tandis que l’amidon est dégradé par les bactéries. L’usine dispose depuis plusieurs années de cette filière de traitement qui permet d’éliminer la majeure partie de la charge polluante et d’optimiser le recyclage de l’eau. La station actuelle respecte donc les normes de rejet dans le Doubs définies par arrêté préfectoral. Cependant, dans le cadre de sa politique d’amélioration continue, la papeterie a décidé d’ajouter à son système un traitement biologique tertiaire.

•  Ce dispositif, aussi appelé rhizosphère, est fondé à la fois sur le principe de filtration par les graviers et sur le pouvoir épurateur des rhizomes des végétaux aquatiques, ainsi que des bactéries qui leur sont associées. Il utilise donc la capacité épuratrice naturelle de végétaux hydrophytes, fréquemment utilisée dans l’épuration des eaux domestiques des petites collectivités, mais qui jusqu’à présent, n’avait jamais été mis en place en France dans une industrie génératrice de pollution organique comme l’est une papeterie. L’objectif de cette réalisation est donc double : améliorer la qualité globale des rejets, notamment en retenant les particules en suspension (MES) restantes et obtenir en fin de traitement une eau de qualité suffisante pour la réutiliser au moins en partie dans le processus industriel.

•  L’installation tertiaire est composée de huit lits filtrants. Quatre sont à flux verticaux agencés en parallèle. Deux de ces filtres sont vierges de toute plantation. Les deux autres sont plantés de roseaux communs de l’espèce Phragmites australis. Les lits ont une surface unitaire de 495 m2. Ils disposent de deux couches de gravier, de bas en haut : une couche de gravier 15-25 mm d’une épaisseur de 50 cm et une autre de gravier 4-8 mm d’une épaisseur de 15 cm. Une moyenne de 35 m3/h d’eau issue du décanteur secondaire est acheminée en surface des lits. L’eau percole au travers du massif de gravier. Un lit à flux horizontal méandriforme, ou chenal, fait suite aux quatre précédents. Il est planté de diverses espèces végétales, principalement des iris, joncs, roseaux, massettes mais aussi une vingtaine d’autres qui garantissent une biodiversité intéressante et favorisent le bon fonctionnement de l’écosystème. Ils totalisent une longueur de 250 m pour une largeur de 2 m. Le lit est rempli de gravier 4-8 mm sur une épaisseur de 20 cm. Quatre conduites en PVC acheminent l’eau issue de chaque lit vertical vers le chenal. L’eau arrive en surface du massif de gravier.

•  Le laboratoire de Biologie et écophysiologie intervient pour conseiller la papeterie dans la gestion de la rhizosphère. Parallèlement, un étudiant effectue une thèse dont les objectifs sont de mieux comprendre les processus biologiques qui interviennent dans l’épuration au niveau des lits de gravier et de déterminer la structuration et le fonctionnement des communautés microbiennes et les interactions entre les micro-organismes en milieu interstitiel aquatique (compétition, mutualisme, prédation…). Une partie des travaux consiste également à préciser l’impact réel du rejet des eaux usées sur la qualité du Doubs en étudiant les micro-organismes bio-indicateurs qui vivent fixés aux galets en amont et en aval du rejet des eaux épurées.

 

Daniel Gilbert
LBE (EA 3184 INRA)
Université de Franche-Comté
Tél. 03 81 66 57 11
daniel.gilbert@univ-fcomte.fr

 

 

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