Université de Franche-Comté

Des réseaux de neurones artificiels pour modéliser le climat


Comment le climat de la planète va-t-il évoluer ? Quels sont les impacts de l'activité humaine sur cette évolution ? Lorsqu'il est question de prévisions et d'anticipation, la seule réponse scientifique disponible est la construction de modèles climatiques. Leurs simulations sont ensuite confrontées aux traces du passé (pollen, cernes des arbres, carottes de glace…) pour démêler les causes, les évolutions et les effets, et permettre de faire ressortir un fonctionnement général qui pourra ensuite être appliqué au futur.
• Au laboratoire de Chrono-écologie de l'université de Franche-Comté, une partie des recherches consiste à quantifier le climat à partir des données du passé. La palynologie fournit la plupart des données actuelles et fossiles. Un référentiel est construit sur la base de données polliniques modernes (mousse, échantillons de sol…) collectées en Europe. Les conditions climatiques qui y sont associées (température moyenne en été, en hiver, précipitations annuelles, disponibilité en eau…) sont donc connues. À partir de données polliniques anciennes, prélevées par carottage dans des lacs ou des tourbières, il est donc possible, en procédant par analogie, de remonter aux conditions climatiques de l'époque considérée. Cette technique sous-entend néanmoins que l'on dispose actuellement de peuplements végétaux équivalents ou proches (certaines plantes ont pu disparaître, certains climats n'existent plus…). Un biais non négligeable est également introduit du fait de l'activité humaine des cinq derniers millénaires. Un indice de similarité est donc calculé entre les principaux taxons* présents dans les diagrammes polliniques** et les données actuelles. Les paramètres climatiques des données actuelles les plus proches des données fossiles sont moyennés pour obtenir des valeurs chiffrées du climat du passé.

• La corrélation entre les diagrammes polliniques et les climats se fait, au laboratoire, en utilisant des outils mathématiques tels que les réseaux de neurones qui reproduisent l'architecture du cerveau humain. Une première étape consiste en une phase d'apprentissage du système : la calibration. Sur les données actuelles, le réseau reçoit en entrée les pourcentages de taxons présents, et en sortie les caractéristiques climatiques correspondantes. Le système établit alors une calibration entre les deux jeux de données, par une régression non-linéaire. Une fois cette phase accomplie, la calibration est utilisée pour quantifier des paramètres climatiques inconnus associés à des pourcentages de taxons collectés dans les carottes.
• Cette méthode a déjà prouvé sa fiabilité. Quelques biais existent néanmoins. Sur les données actuelles, le quadrillage du territoire par les stations climatiques peut être plus ou moins précis, et les bases de données actuelles doivent encore être enrichies. Par ailleurs, la principale difficulté émerge quand il s'agit de retrouver des changements rapides de végétations, a fortiori quand il n'existe plus d'analogues climatiques actuels, à l'instar des steppes froides du dernier maximum glaciaire (il y a 18 000 ans). Cependant, cette modélisation, parce qu'elle définit un cadre général, peut remonter à 3 millions d'années. Au laboratoire de Chrono-écologie, ce sont surtout les derniers 18 000 ans et les périodes d'anthropisation qui sont étudiés.

* Taxons : regroupement de végétaux par genres ou espèces comparables. Une centaine de taxons sont définis.

** Diagramme pollinique : diagramme montrant les proportions des différents taxons en fonction de l'âge ou de la profondeur sur un territoire donné.

 

Odile Peyron
Laboratoire de Chrono-écologie
Université de Franche-Comté
Tél. 03 81 66 66 69
odile.peyron@univ-fcomte.fr

 

 

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