Extrait du dossier La subjectivité, arme du crime ? – en direct n°272 – Septembre-octobre 2017
À l’ILCE (1), l’Institut de lutte contre la criminalité économique basé à Neuchâtel à la Haute Ecole de gestion Arc , Olivier Beaudet-Labrecque s’intéresse à la défense d’une catégorie particulière de public potentiellement vulnérable : les personnes âgées. Et plus particulièrement encore, aux abus financiers dont elles peuvent faire l’objet.
« C’est un sujet qui émeut beaucoup, et les jeunes stagiaires que nous avons recrutés s’investissent énormément dans le projet de recherche qui vient de démarrer», raconte le criminologue. Un projet mandaté par l’association Pro Senectute pour d’abord établir un état des lieux en Suisse. «Dans d’autres pays on sait que l’abus financier à l’encontre des personnes âgées est véritablement un problème. Nous verrons si la situation se confirme en Suisse également. »
Avec le concours de Pro Senectute, qui compte plus de dix-sept mille bénévoles au service des personnes âgées sur tout le territoire suisse, les chercheurs de l’ILCE vont qualifier l’abus financier en se référant aux professionnels de la banque, des autorités de poursuite, des corps de police, des associations de consommateurs… À l’issue d’une enquête d’abord qualitative puis quantitative, ils donneront une estimation du nombre des victimes de ces abus, qui fera l’objet de comparaisons avec les chiffres de la police. Les escroqueries commises sur le web sont particulièrement dans le collimateur, une étude de l’université de Zurich ayant montré que de plus en plus de personnes âgées utilisent internet, notamment pour effectuer des achats. « L’objectif de l’étude est à terme de former les personnes âgées à la cyberdéfense, et parallèlement de composer une boîte à outils à l’attention des intervenants sociaux qui pourront s’en servir pour apporter leur aide aux victimes d’abus. »
Même démarche de sensibilisation auprès des entrepreneurs, pour qui des cycles de formation seront organisés dès cet automne. Le but ? Inculquer les bons réflexes et enseigner les procédés à suivre aux dirigeants, de PME notamment, qui ne sont pas toujours bien armés pour lutter contre les revers de médaille d’internet.
« Certains d’entre eux ne savent même pas où sont stockées leurs informations, note Isabelle Augsburger-Bucheli, doyenne de l’ILCE. Sensibiliser les PME aux dangers qu’elles encourent est réellement essentiel, et pour cela nous comptons faire jouer notre réseau d’entreprises, leur demander de relayer notre démarche auprès de leurs collègues. » L’ILCE incite ses experts à se mesurer aux évolutions technologiques les plus récentes. « C’est là que s’ouvrent des brèches où les escrocs ne manquent pas de s’infiltrer », témoigne Luca Brunoni. Dans un projet en démarrage à la Haute Ecole Arc, le jeune juriste s’intéresse à l’essor des blockchains, ces bases de données dont la sécurité est assurée par une succession de nœuds de stockage, et qui trouvent depuis peu une application dans la gestion des objets connectés. « Il s’agit d’établir une surveillance, de voir si la survenue des problèmes nouveaux se heurte à un vide juridique, de savoir comment se protéger face à des escroqueries encore inconnues. »
Ce premier projet est mené en collaboration avec les spécialistes en informatique des blockchains du domaine Ingénierie de la Haute Ecole Arc.