Après le lin et le chanvre, l’ortie fait un retour remarqué dans le monde des fibres végétales. Elle aussi dotée de qualités intéressant le domaine mécanique ou l’industrie textile, elle connaît un regain d’intérêt depuis quelques années, notamment en France et en Allemagne. Gourmande en azote, l’ortie est difficile à faire pousser, un comble quand on voit comment elle sait envahir les jardins ; elle est aussi délicate à travailler, et c’est cette double exigence qui l’a longtemps écartée des marchés au profit du lin et du chanvre.
Aujourd’hui considérée comme une autre ressource naturelle durable, à fort potentiel industriel, l’ortie pique l’attention des chercheurs comtois, qui depuis quatre ans en font l’objet de certains de leurs travaux. Le projet européen NETFIB(1), lancé en novembre dernier et coordonné par Michel Chalot au laboratoire Chrono-environnement, envisage la culture d’orties sur friches industrielles, des parcelles impossibles à rendre à l’agriculture actuellement. « Nous avons observé que l’ortie se propage sous plantation de peupliers au point de devenir l’espèce dominante dans ces friches, raconte Michel Chalot. L’objectif est d’augmenter cette propension naturelle à l’aide de fertilisants organiques, digestat ou compost, ou biologiques, comme les champignons endophytes, pour améliorer la productivité sur des terrains généralement appauvris en éléments nutritifs. »
Une autre ambition du projet est d’évaluer la qualité des fibres ainsi obtenues, de caractériser leurs propriétés et de s’assurer de leur facilité de traitement. Le projet prévoit entre autres de tester différents procédés de traitement pour séparer l’enveloppe de la tige et les fibres qui se trouvent à l’intérieur, par séchage hors site ou par rouissage sur site ; cette dernière méthode, traditionnelle, consiste à laisser les tiges se décomposer sur place, mais n’est pas forcément adaptée aux friches industrielles contaminées.
Impliquant des compétences en mécanique, le projet reçoit la collaboration, à l’Institut FEMTO-ST, de l’équipe de Vincent Placet, spécialiste reconnu des fibres végétales. NETFIB bénéficie d’un financement du programme ERA-NET SusCrop pour un montant d’1,5 M€ et pour une durée de trois ans. C’est l’un des 13 projets retenus, sur 120, au titre de ce programme européen dédié à la production agricole durable, et le seul porté par une équipe française.
(1) NETFIB est également mené avec, pour la partie française, la société INOVYN de Tavaux (39) et l’université de Lorraine, et en Europe les partenaires académiques Hochschule Bremen (Allemagne), Universität für Bodenkultur Wien (Autriche), Leibniz-Institut für Agrartechnik und Bioökonomie (Allemagne), Università Cattolica del Sacro Cuore (Italie) et R3 Environnement (Royaume-Uni).