Université de Franche-Comté

COVID-19 : la preuve de l’action du système immunitaire par les lymphocytes T

L’histoire mondiale des cent dernières années est endeuillée par la mort de dizaines de millions de victimes d’épidémies et de pandémies dues à des virus. Grippe espagnole, grippe asiatique, grippe de Hong-Kong… virus Ebola, Zika, Chikungunya… Mers-CoV, SARS-CoV-1, SARS-CoV-2… le nom de COVID-19 s’inscrit à la suite sur ce tableau décidément très noir, sans qu’on sache aujourd’hui vraiment de quelle façon le virus va se comporter et la maladie évoluer au cours des prochains mois, voire des prochaines années. En virologie, immunologie, pharmacie et dans d’autres disciplines encore, les chercheurs n’ont qu’un mot d’ordre : se préparer au mieux pour l’avenir, dans un monde qui ne peut ignorer plus longtemps l’omniprésence de la menace des virus.

Les lymphocytes T sont des acteurs essentiels du système immuni­taire adaptatif. Les chercheurs de l’unité RIGHT travaillent depuis plusieurs années à maîtriser le processus d’activation de ces lym­phocytes à des fins pronostiques et thérapeutiques, notamment dans le contexte du cancer.

Les connaissances biologiques et le savoir-faire technologique ainsi développés ont été mis au profit de la lutte contre le SARS-CoV-2 dans une étude baptisée COV-CREM, pour caractéristiques des réponses effectrices et mémoires. L’étude a démontré l’activation des lympho­cytes T en présence de fragments de protéines appelés « peptides », présents dans le virus. « Cela signifie que le système immu­nitaire adaptatif reconnaît le virus et qu’il est en capacité de détruire les cellules infectées par lui », expliquent le Dr Marie Kroemer, pharmacien à l’unité de pharmacie clinique oncologique du CHU de Besançon, qui a piloté l’étude, et le Dr Laurie Spehner, ingénieure de recherche en biologie. Toutes deux effectuent des recherches pour identifier de nouveaux biomarqueurs dans le cadre de l’administration de traitements anticancéreux et de la prise en charge globale des patients atteints de cancers, dans l’équipe du Pr Christophe Borg au laboratoire RIGHT. « Grandement impliqués, les services de mala­dies infectieuses et de réanima­tion médicale et chirurgicale du CHU, représentés par le Dr Kévin Bouiller et le Dr Lucie Vettoretti, ont largement contribué au succès et à la rapidité de réalisation de l’étude », souligne Marie Kroemer.

60 personnes ayant été atteintes de la COVID-19 ont été incluses dans deux cohortes de tailles comparables : la première com­posée de patients ayant présenté des symptômes légers, selon les critères de l’OMS, la seconde de patients grièvement atteints, ayant souffert d’une pneumonie avec indication d’oxygénothérapie. Une prise de sang effectuée lors d’une visite de contrôle à l’hôpital a permis de recueillir les lympho­cytes T puis de les étudier après isolement par des techniques de culture cellulaire, précise Laurie Spehner. Leur mise en contact pendant 48 heures avec des peptides dérivés des protéines du virus a mis en évidence l’activa­tion de lymphocytes T spécifiques d’au-moins un peptide pour 83 % des patients de l’étude ».

La comparaison entre les deux cohortes témoigne d’une acti­vation lymphocytaire T plus fréquente chez les patients grièvement atteints (94 %) que chez les patients ayant présenté des symptômes légers (70 %). « Mais chez les patients légère­ment atteints, l’activation était plus forte, donnant à espérer que l’efficacité du système immuni­taire pourrait se prolonger dans le temps. » L’activation des lympho­cytes T de ces patients pourrait à nouveau être étudiée dans une année pour vérifier si le système immunitaire a mis en place une mémoire immunitaire durable et spécifique du SARS-CoV-2.

Les lymphocytes T orchestrent par ailleurs la réponse immunitaire adaptative en favorisant l’activa­tion des lymphocytes B, à l’ori­gine de la synthèse d’anticorps spécifiques des protéines des virus. Dans l’étude COV-CREM, la sérologie (anticorps spécifique du SARS-CoV-2), effectuée chez tous les patients, était positive dans 95 % des cas.

Les résultats combinés de cette étude pionnière sur la présence de lymphocytes T spécifiques du virus confirment la pertinence de la piste du vaccin dans le cadre de la lutte contre la COVID-19.

Contact(s) :
Unité de recherche RIGHT « Interactions Hôte-Greffon-Tumeur, Ingénierie Cellulaire et Génique »
EFS / UFC / INSERM
Marie Kroemer / Laurie Spehner
Tél. : +33 (0)3 70 63 22 81
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