Université de Franche-Comté

Broches et vis résorbables

Si les fils résorbables en fibres de polymère sont depuis longtemps utilisés en chirurgie, les dispositifs employés pour aider les os à se reconstruire en cas de fracture, comme les broches et les vis métalliques, nécessitent toujours d’être implantés puis en général d’être retirés, un protocole imposant deux interventions chirurgicales. Les premiers implants résorbables métalliques commencent cependant à faire leur apparition sur le marché. Le matériau vedette est le magnésium, qui présente l’avantage d’être l’alliage le plus proche de l’os humain en termes de densité et de rigidité, une particularité donnant le meilleur comportement mécanique au couple os-implant. Par ailleurs, le magnésium est éliminé naturellement par l’organisme, mais ce qui apparaît là aussi comme un avantage présente des limites : la dissolution du magnésium, si elle est trop rapide, empêche une bonne reconstruction de l’os. De plus, elle génère des bulles d’hydrogène qui, si elles ne sont pas évacuées rapidement, constituent des poches de gaz responsables d’un retard de guérison, et dans les cas les plus sévères, de nécroses des tissus osseux, voire du blocage de la circulation sanguine lorsqu’elles se trouvent dans les vaisseaux sanguins, laissant craindre le décès du patient.

Pièce en cours de traitement PEO 2- © HE-Arc

Pour que le processus de dissolution du magnésium s’opère de manière lente et adaptée au fonctionnement de l’organisme, une équipe de chercheurs1 menée par Oksana Banakh à la Haute Ecole Arc Ingénierie a mis au point un nouveau procédé électrochimique retardant la corrosion du magnésium. « Une couche de protection est obtenue par un traitement de surface connu sous le nom de conversion anodique, anodisation électrolytique ou encore éloxage. La surface du métal, ici le magnésium, se convertit progressivement en une couche céramique d’hydroxyde métallique (Mg(OH)2) résistante à la corrosion et à l’usure.

Cependant, à la différence avec le procédé classique, largement utilisé dans l’industrie, l’oxydation du métal est ici assistée par microarcs, qui en apportant une grande énergie à la couche en croissance, en améliore la structure et la résistance à la corrosion », explique Tony Jourdot, collaborateur technique. La couche céramique résiste beaucoup mieux à la corrosion que l’alliage métallique de base, retardant le moment où celui-ci est altéré à son tour : le phénomène de dissolution du magnésium est progressif et contrôlé, la stabilité de l’implant garantit une bonne consolidation de l’os et sa disparition graduelle ne provoque pas d’effets secondaires dans l’organisme. « Les alliages de magnésium sont très utilisés en chirurgie orthopédique sur le continent asiatique, car ils sont beaucoup moins coûteux que l’acier ou le titane.

En Europe, ces implants biodégradables commencent à faire leur apparition sur le marché. Notre procédé pourrait leur apporter une meilleure qualité, et offrir de nouveaux débouchés aux industriels de l’Arc jurassien franco-suisse, qui maîtrisent les techniques électrochimiques de traitement de surface. Cela permettrait de stimuler la compétitivité et la croissance économique de notre région par l’introduction de méthodes innovantes. »

 

 

Article extrait du Grand format n° 285, novembre-décembre 2019 de en direct.

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