Un microrobot est un robot dont le volume est inférieur à un cube de 10 mm de côté, fabriqué collectivement par des technologies de salle blanche (plusieurs pièces sont construites en même temps) et effectuant des tâches dans le micromonde. Il est bon de rappeler cette définition. Depuis que la course à la miniaturisation a commencé dans le domaine de la robotique, les appellations ont souvent devancé les réalisations et de très nombreuses structures ont été qualifiées de microrobots. Létude et la conception de la structure mécanique et du micro-actionnement dun microrobot à pattes de très petites dimensions (apparemment même le plus petit au monde) ont été effectuées au LAB ― laboratoire dAutomatique de Besançon ― et ont fait lobjet dune thèse soutenue le 25/11/02. Les microrobots à pattes existant dans le monde sont très peu nombreux. À lheure actuelle, cinq ont été répertoriés. Deux dentre eux sont terminés, les autres sont en cours détude ou nont pas été finalisés. Cette relative rareté sexplique en partie par la difficulté que représente lintégration dactionneurs* sur de si petites structures.
• Résoudre le problème de la locomotion du microrobot et de son actionnement a été la première étape. Après étude de la littérature, deux types dactionneurs, piézoélectrique et à expansion thermique, ont été choisis pour être testés. Ils ont donc été fabriqués en salle blanche et caractérisés au laboratoire. Les actionneurs à expansion thermique ont été retenus pour leur déflexion importante, leur grande densité dénergie, ainsi que pour leur relative facilité de réalisation par microfabrication. Ces micro-actionneurs, de type poutre encastrée-libre, sont constitués de trois couches : une couche de silicium (20 œm), une couche métallique (1 œm) et une couche de résine polymère utilisée en microfabrication, la résine SU-8 (60 œm). Alors que la couche de résine est chauffée par conduction thermique, les couches de silicium et de métal sont chauffées par effet Joule. Le chauffage de lactionneur, encastré à une extrémité, provoque une déflexion à son extrémité libre. Pour un actionneur de 2 mm de longueur, de 100 œm de largeur et de 80 œm dépaisseur, la déflexion obtenue est de lordre de 120 à 150 œm, et la force de blocage (leffort appliqué à lextrémité de lactionneur pour ramener celui-ci dans sa position initiale lorsquil est alimenté) est de lordre de 8 mN. La fréquence dactionnement est de 2,5 Hz. Ces performances étant satisfaisantes, les actionneurs ont été intégrés pour concevoir des pattes.
• Chaque patte du microrobot est constituée de deux actionneurs thermiques, fonctionnant en opposition, qui lui procurent les deux degrés de liberté nécessaires à son avance. Ces deux actionneurs positionnés en parallèle sont reliés entre eux à leur extrémité par une poutre de liaison en résine SU-8 supportant le pied. Après avoir été réalisées par microfabrication en salle blanche, les pattes ont été testées, ce qui a permis de déterminer les performances attendues pour le microrobot, soit une vitesse de 100 œm/s, une charge portée de 5,3 g, une énergie consommée de 648 mJ par pas. Ces pattes permettront aussi le déplacement du microrobot sur des surfaces de topologie et de rugosité variables.
• La structure complète du microrobot a ensuite été réalisée de manière monolithique en intégrant six pattes autour dun corps en silicium. Le nombre de pattes a été choisi par mimétisme avec les insectes, mais aussi parce quil assure le maximum de stabilité pendant la marche tout en nétant pas trop complexe à synchroniser. Ses dimensions hors tout sont de 3,5 mm de long, 6 mm de large et 0,5 mm de haut. Après vérification de la synchronisation des pattes, les performances de ce nouveau microrobot ont été expérimentées. Une masse de 2 g a été posée sur son corps sans que celui-ci ne se déforme ni que les pattes ne saffaissent. Ensuite, le microrobot a été posé sur des surfaces inclinées pour déterminer linclinaison limite de glissement. Elle a été relevée à 20° par rapport à lhorizontale sur une surface en papier, et à 12° sur une surface en verre poli. La comparaison avec les différents travaux à travers le monde savère très encourageante. Notamment, ce microrobot, possédant six pattes et se déplaçant sur un sol ne participant pas à sa locomotion, semble être le plus petit au monde. Cest également lui qui est capable de supporter la charge la plus importante.
• La prochaine étape consiste à intégrer la connectique sur le corps du microrobot par microfabrication, afin deffectuer des expérimentations plus avancées. À plus long terme, il est envisagé dintégrer son énergie pour le rendre autonome, sa commande, des capteurs pour lui permettre de percevoir son environnement, des organes de télécommunication pour le commander à distance ou pour envisager den faire collaborer plusieurs et un organe de préhension pour lui faire faire des tâches de micro-manipulation. Ce microrobot pourra être utilisé dans lexploration denvironnements confinés ou hostiles, dans le microconvoyage ou le micropositionnement dobjets de petite dimension, dans lassemblage de micro-objets, ou, à plus long terme, pour limmersion dans un environnement dinsectes vivants, ce qui permettrait denvoyer des signaux à ces insectes pour leur faire réaliser des tâches.
Agnès Bonvilain
Laboratoire dAutomatique de Besançon
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