Affichant des valeurs de l’ordre de 16 chiffres après la virgule, la fréquence est la grandeur physique mesurée avec la plus grande exactitude. La fréquence, et sa grandeur duale qu’est le temps, sont garants du bon fonctionnement de nombreuses applications et services dans nos sociétés modernes, géolocalisation, organisation des trafics aérien et ferroviaire, synchronisation des réseaux de communication haut débit, datation des échanges financiers… L’élaboration du temps, et du même temps pour tous, quel que soit l’endroit où l’on se trouve sur la planète, est le produit des échanges des informations de fréquence issues de centaines d’horloges atomiques reliées entre elles, vérifiées et ajustées sans cesse par les technologies du domaine du temps-fréquence.
Contrôler la fabrication du temps se double d’un impératif tout aussi exigeant : sa diffusion. La transmission du temps est assurée par fibre optique, par communication radiofréquence sans fil à très basse fréquence et surtout par satellite. Dans ce dernier cas, elle peut être menacée par des aléas climatiques telle une éruption solaire, et par des perturbations volontairement infligées aux réseaux.
C’est pour contrer ces attaques que l’Institut FEMTO-ST et l’entreprise Gorgy Timing ont décidé d’unir leurs forces dans un laboratoire commun, Fast Lab. « Savoir leurrer les signaux émis par un GPS était auparavant l’apanage des grandes organisations étatiques, explique Jean-Michel Friedt, enseignant en électronique à l’université de Franche-Comté et responsable de Fast Lab à l’Institut FEMTO-ST. Aujourd’hui, avec un simple logiciel téléchargé1 sur internet, il est facile de leurrer un récepteur GPS. » Et de mettre en péril la transmission du temps. Conséquences possibles ? Une voiture localisée à Brest alors qu’elle roule en réalité à Besançon, ou des horloges indiquant des heures différentes entre le hall et les quais d’une même gare, pour ne citer que quelques exemples fâcheux.
L’un des objectifs de Fast Lab est de créer une horloge composite fusionnant les signaux provenant de différentes sources pour pouvoir détecter les leurres, et ainsi protéger les systèmes du brouillage tout comme des informations erronées qui pourraient être injectées. L’équipe a mis à profit les premiers mois de la collaboration pour mettre au point un prototype de boîtier électronique capable d’identifier les signaux erronés avant qu’ils n’infiltrent les systèmes informatiques.
Le projet Fast Lab bénéficie d’un financement de l’ANR (Agence nationale de la recherche) de 300 000 € pour 3 ans (2018-2021).
1 Accéder à ce logiciel libre donne aussi la possibilité d’en consulter le fonctionnement, et de comprendre comment se produit une attaque de leurrage pour mieux s’en prémunir.
L’objectif d’un LabCom est d’aider les petites et moyennes entreprises à accéder à la recherche publique.
Ce dispositif, lancé en 2013 et financé par l’ANR, a vu jusqu’à aujourd’hui la création de 139 LabComs à travers l’Hexagone, dont 4 en Bourgogne – Franche-Comté.
Pour l’entreprise grenobloise Gorgy Timing, spécialisée dans la sécurité des serveurs de temps et qui consacre 30% de son chiffre d’affaires en R&D, cette association répond à une véritable volonté « de ne pas fonctionner en vase clos, mais au contraire de collaborer avec le meilleur de la recherche en temps-fréquence. »