Comprendre pourquoi et comment l’expression des gènes est régulée au niveau de l’ADN, tel est l’objectif de la recherche en épigénétique, dont une plateforme a récemment été installée à Besançon. Un atout majeur pour la recherche académique comme pour les collaborations industrielles avec le domaine biomédical.
Le génome humain comporte quelque 30 000 gènes, tous inscrits dans cette sorte de grand catalogue appelé ADN, une molécule à l’origine de la formation des cellules. Si les cellules possèdent toutes un matériel génétique identique, l’expression des gènes est fonction de la fixation de protéines sur l’ADN. L’épigénétique étudie comment leur environnement peut influer sur l’activité des gènes. Éric Hervouet et Paul Peixoto sont enseignants en biologie moléculaire à l’université de Franche-Comté, et chercheurs au laboratoire Interactions hôte-greffon-tumeur & ingénierie cellulaire et génique. Depuis novembre dernier, leurs travaux bénéficient des équipements d’une plateforme d’épigénétique de haute performance, alors financée par la Région Franche-Comté.
« EPIGENEXP assure une qualité optimale et la reproductibilité d’analyses intéressant de nombreuses applications médicales, comme la virologie, l’immunologie ou la cancérologie. » Avec à la clé un niveau scientifique de recherche optimal pour les laboratoires, et la possibilité de faire profiter les entreprises de telles performances.
« La particularité de l’épigénétique est de travailler sur l’expression des gènes sans modifier la séquence de l’ADN », expliquent les deux chercheurs. Eux s’intéressent particulièrement à la partie de la séquence d’ADN qui se trouve juste avant le gène, et qui est le « promoteur » de son expression. C’est en effet sur ce promoteur que vont se fixer, ou non, les protéines susceptibles d’enclencher le processus d’activation du gène. »
L’environnement joue sur le contrôle de l’information génétique. Si la reine d’une ruche est plus grande que les autres abeilles alors que ses cellules possèdent les mêmes caractéristiques génétiques, c’est uniquement parce que son alimentation, à base de gelée royale, est différente. » Explication : à l’intérieur de la molécule d’ADN, chargée négativement, se trouvent des protéines, les histones, chargées positivement. Ensemble, elles forment ce qu’on appelle la chromatine, dont la densité dépend en partie de l’équilibre de ces charges. L’alimentation peut entraîner la modification de la charge des histones et par là même faire baisser la compacité de la chromatine, ce qui favorise la fixation à l’ADN de protéines susceptibles de modifier l’expression du gène. En cancérologie, Éric Hervouet et Paul Peixoto travaillent sur la formation des métastases.
Les techniques d’épigénétique classiques associées au séquençage de l’ADN permettent de rechercher les mécanismes, au niveau du génome entier, expliquant que des cellules cancéreuses se détachent d’une tumeur pour migrer vers d’autres tissus et y donnent naissance à des métastases. Les échantillons qui font l’objet du séquençage requièrent une préparation de haute qualité, rendue possible par la plateforme. « Le séquençage donne la possibilité de localiser une protéine dans tous les endroits du génome où elle a pu se fixer. On peut dès lors imaginer avoir un moyen d’action sur le blocage ou à l’inverse le déblocage de l’expression d’un gène. » Avec l’espoir de pouvoir agir un jour sur les mécanismes génétiques pour lutter contre le cancer.
Contacts :
Éric Hervouet / Paul Peixoto
Laboratoire Interactions hôte-greffon-tumeur & ingénierie cellulaire et génique
EFS Bourgogne – Franche-Comté / Université de Franche-Comté / INSERM
Tél. +33 (0)3 81 66 55 67