Corps célestes essentiellement constitués de glace, les comètes contiennent aussi des matériaux dont certains n’ont pu être formés qu’à très haute température. Comment expliquer un tel phénomène ? Les astrophysiciens de l’Institut UTINAM pourraient bien avoir trouvé la clé du mystère…
En 2006, la sonde américaine Stardust rapporte sur Terre des particules de matière capturées dans la chevelure de la comète Wild 2. L’analyse des échantillons révèle la présence de silicates cristallins, confirmant des observations antérieures établies par spectroscopie. Or, la formation de certains de ces matériaux requiert une température bien supérieure à 1 000 K (soit plus de 700°C). Comment expliquer alors qu’ils puissent se trouver dans des comètes entièrement glacées ? Le scénario le plus plausible défend l’idée que ces matériaux, nés à proximité du Soleil lors de la formation du système solaire, ont migré par la suite vers une partie plus froide de la nébuleuse, où ils ont participé à la formation des comètes. Mais qu’est-ce qui a bien pu les entraîner vers d’autres latitudes ? C’est ici qu’entrent en scène Crookes et son radiomètre, dont la mise au point en 1873 est à l’origine de la découverte de la force de photophorèse. Celle-ci met en évidence qu’une particule, chauffée par rayonnement sur l’une de ses faces, subit des pressions de gaz plus fortes que sur son côté froid, provoquant ainsi son déplacement (cf. encart).
Il restait à démontrer que la photophorèse pouvait être une force suffisamment dominante à un moment donné de la formation du système solaire pour permettre un tel déplacement de matière à l’intérieur de la nébuleuse. Les astrophysiciens de l’Institut UTINAM ont apporté la preuve de la faisabilité de ce phénomène en se plaçant dans des conditions réalistes, à partir d’une description temporelle et spatiale de la formation du système solaire pour laquelle sont indiquées les conditions de pression, les radiations, les températures des gaz… La constitution des disques protoplanétaires, précurseurs de la formation des planètes, aurait favorisé le développement de la force de photophorèse, permettant la migration à la lisière du système solaire, là où se trouveront les comètes, de matériaux nés tout près du Soleil.
Il existerait deux réservoirs de comètes : la ceinture de Kuiper, située au-delà de Neptune, à environ 35 à 50 UA (unités astronomiques) du Soleil ; le nuage d’Oort, aux confins du système solaire, distant de 10 000 à 100 000 UA. Une UA représente la distance de la Terre au Soleil, soit 150 millions de kilomètres.
L’explication de la force de photophorèse est tout entière incluse dans le radiomètre de Crookes. Un petit moulin est enfermé dans une ampoule de verre où règne un vide relativement poussé, mais où il subsiste encore suffisamment de gaz pour que l’expérience puisse être concluante.
Les pales du moulin ont chacune une face très réfléchissante et une face noire. Lorsque le radiomètre est exposé à un rayonnement lumineux, la partie noire absorbe les photons et chauffe. Lorsqu’elles entrent en contact avec cette face, les molécules de gaz contenu dans le radiomètre s’échauffent elles aussi, ce qui leur donne de la vitesse. C’est donc la différence de température entre les faces absorbantes et réfléchissantes des pales qui induit une variation de pression du gaz, créant ainsi le mouvement : les faces sombres des pales sont comme poussées, et le moulin se met à tourner.
Contact : Jean-Marc Petit – Olivier Mousis
Institut UTINAM
Observatoire des sciences de l’Univers de Besançon
Université de Franche-Comté / CNRS
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