Université de Franche-Comté

Guerre en Ukraine
Mais que fait la (géo)politique ?

Outre un drame humanitaire évident, le conflit en Ukraine apporte de manière brutale et tragique son lot de questions d’ordre géopolitique et économique. En amont, pourquoi les pays occidentaux n’ont-ils pas su empêcher la guerre ? (voir ci-dessous) Et au nombre des conséquences d’un tel conflit, les répercussions sur le coût des matières premières pourraient-elles être mieux anticipées (lire ici ) ?

 

Manifestation à Paris contre l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Photo Hubert2T, Pixabay

En février 2000, Grosny, la capitale de la Tchétchénie, tombait aux mains de l’armée russe. L’annexion de la petite république ne suscite que peu de réactions de la part de la communauté internationale. En 2008, la Russie conquiert l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud, en Géorgie. En 2014, c’est au tour de la Crimée de passer sous contrôle russe ; les prises de position à l’international sont contrastées, mais de premières vraies sanctions économiques sont appliquées.

Elles sont cependant sans effet à long terme : en février 2022, les attaques russes jettent l’Ukraine dans le chaos. La guerre suscite cette fois une grande indignation à l’international ; l’Union européenne se distingue par la réaction concertée de ses membres et l’application de sanctions sévères sur le plan économique.

Un retour rapide et sommaire sur les vingt dernières années suffit à mettre en évidence la détermination de la Russie à renouveler et affirmer sa puissance, sur ce qu’elle considère comme son territoire, quel qu’en soit le prix à payer pour les populations. Pourquoi la réaction du monde occidental, pays européens et États-Unis en tête, semble avoir tellement tardé ? Enseignant-chercheur en droit public, membre du CRJFC, Rémy Prouvèze explique que la principale raison se trouve dans la nature même des relations internationales.

 

Un pouvoir limité des instances supra-étatiques

« Même si le droit international public a beaucoup progressé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, aucune instance internationale n’est d’autorité supérieure aux États. Il est difficile de donner des réponses collectives, car chaque pays est souverain et animé par son propre intérêt. » Les organisations inter­nationales, telles que l’ONU ou l’OCDE, ne sont pas des super-États qui imposeraient leurs décisions aux États membres. La plupart du temps, ce sont essentiellement des lieux de négociations et de diplomatie.

Au final, ce sont les États qui restent les maîtres du jeu, qui gardent le pouvoir de décision. « On attend beaucoup des organisations internationales, mais elles restent des créatures des États ; leur pouvoir est plus limité qu’on le pense, et leur fonctionnement est soumis à des rapports de force et à un jeu très complexes. Ce n’est pas qu’une impression : les décisions sont souvent prises en réaction à une situation, et au dernier moment, car il n’est pas toujours possible de se mettre d’accord avant, compte tenu des intérêts divergents, voire contradictoires, des États. »

 

 

 

Article extrait du n° 300, mai-juin 2022 de en direct.

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