Université de Franche-Comté

Guerre en Ukraine
Quelles ficelles pour prédire l’évolution des marchés ?

Outre un drame humanitaire évident, le conflit en Ukraine apporte de manière brutale et tragique son lot de questions d’ordre géopolitique et économique. En amont, pourquoi les pays occidentaux n’ont-ils pas su empêcher la guerre ? (lire ici) Et au nombre des conséquences d’un tel conflit, les répercussions sur le coût des matières premières pourraient-elles être mieux anticipées ? (voir ci-dessous)

 

 

Photo RachenStocker, Shutterstock

COVID, acte 1 : la crise sanitaire paralyse l’économie, le ralentis­sement mondial de la consommation puis celui de la production font chuter la demande de matières premières, et par là même leur prix. Ou plus exactement le prix des contrats à terme engagés sur ces produits. Conclus de manière anticipée pour une livraison fixée à l’avance, les contrats à terme se sont dépréciés de façon incroyable au début de la crise sanitaire, leur valeur passant même parfois en négatif : encouragés par des comportements spéculatifs, certains contrats passés sur le pétrole, concernant des millions de barils devenus impossibles à livrer faute de possibilités de stockage suffisantes pour les clients, ont même dû être vendus à perte par ceux qui les détenaient.

COVID, acte 2 : l’économie repart en flèche, et la demande devient supérieure à l’offre. Cette inversion de tendance radicale fait exploser la valeur des contrats, en partie parce qu’elle a été insuffisamment anticipée et mesurée.

Pour être d’un registre totalement différent, la situation en Ukraine a également pris tout le monde de court, et génère un scénario similaire : la loi de l’offre et de la demande est soumise aux tensions avec la Russie, l’un des plus gros exportateurs de pétrole au monde et le premier pour le gaz, tensions qui provoquent elles aussi la flambée des prix.

Enseignant-chercheur à l’univer­sité de Franche-Comté / CRESE, Jean-Baptiste Bonnier met en avant des indices géopolitiques pour tenter d’anticiper les fluctuations des prix des matières premières en contexte de crise. « Il s’agit d’utiliser les informations données dans la presse, à partir de mots associés à des potentialités de tension ou de guerre dans le monde, pour bâtir un modèle de prévision à un mois. »

Ce modèle, qui concerne en premier lieu le pétrole et pourrait se décliner par la suite à d’autres matières premières, est une mise en application des principes de l’économétrie, une discipline qui s’appuie sur les statistiques pour permettre, entre autres, d’établir des liens entre différentes variables. Le modèle fait actuellement l’objet de tests, de réajustements, puis de nouvelles évaluations, pour en éprouver la robustesse et juger de sa pertinence, comparativement aux modèles que le chercheur développe par ailleurs sur d’autres typologies de risques.

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