Université de Franche-Comté

Un seul gène manque à l'appel et les culture de blé sont ravagées

Ensemble depuis toujours et pour le pire, le blé et le champignon sont arrivés à un point crucial de leur histoire : Zymoseptoria tritici a pris le dessus et impose sa loi dans les récoltes de blé, provoquant des dégâts incroyables, sous le nom de septoriose. Des chercheurs suisses viennent de mettre en évidence le mécanisme génétique responsable de ce phénomène. Une première mondiale qui donne l’espoir que le blé regagne un jour du terrain…

épis de blé 

La septoriose touche les cultures de blé partout dans le monde ; elle est à l’origine de pertes de rendement parfois supérieures à 40 %. Le champignon responsable de cette maladie sait aujourd’hui déjouer les défenses immunitaires que la plante a pu activer contre lui par le passé ; il développe de plus des résistances qui le rendent insensible aux traitements antifongiques en quelques années, mais cela est une autre histoire scientifique.

Spécialiste de génétique évolutive, Daniel Croll a découvert pourquoi le système de défense du blé est aujourd’hui défaillant contre Zymoseptoria tritici. Des recherches de premier plan initiées à l’École polytechnique fédérale de Zurich et poursuivies à l’université de Neuchâtel1, avec des équipes travaillant en pleine collaboration. Zymoseptoria tritici est caractérisé par un génome très variable. Au cours de son évolution récente, il a perdu le gène qui permettait au blé de le détecter et d’activer son système immunitaire contre l’attaque de cet hôte indésirable. Une perte visiblement due au seul hasard, mais dont le pathogène, vu son intérêt, fait désormais une stratégie. « Le processus est en cours, comme en Suisse où la moitié des individus sont désormais dépourvus de ce gène. »

Le champignon est apparu en même temps que les premières cultures de blé il y a dix mille ans. S’ils cheminent ensemble depuis, ce n’est pas dans les mêmes conditions : le blé, lui, ne sait pas s’acclimater à l’évolution de son environnement, et ne peut que subir les agressions d’un ennemi en constante adaptation. « Cependant, on connaît vingt et un récepteurs chez le blé capables d’identifier des molécules codées par les gènes des champignons, et qui seraient donc susceptibles de détecter la présence de ces derniers selon un nouveau stratagème. » Un « dialogue moléculaire » à mettre à profit pour l’avenir, en sélectionnant les variétés de blé les plus résistantes possibles parmi les milliers d’espèces existantes. « L’identification du gène « perdu » chez le champignon, qui était à l’origine de l’activation du système immunitaire de la plante, nous aidera à trouver le gène qui sera le plus apte à assurer désormais ce rôle, y compris sur la durée, car nous saurons aussi estimer son espérance de vie dans le génome de Zymoseptoria tritici. »

La technique employée par les chercheurs est connue en génétique humaine sous le nom de GWAS (Genome-Wide Association Study). Pour la première fois utilisée pour analyser le génome d’un champignon, elle s’avère reproductible pour étudier les systèmes de défense d’autres céréales, de la vigne… Seule condition requise : que le pathogène ait évolué avec la plante.

 

1 Le laboratoire de Botanique évolutive, s’ouvrant à des recherches de spectre plus large, a pris le nom de laboratoire de Génétique évolutive à l’arrivée de Daniel Croll à l’Université de Neuchâtel en janvier 2017.

Contact :

Daniel Croll

Laboratoire de Génétique évolutive – Faculté des sciences – Université de Neuchâtel

Tél. : +41 (0)32 718 23 30

 

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