Université de Franche-Comté

La tragédie antique, une histoire de famille mêlée de politique

Les mythes les plus illustres et les plus sanglants de la tragédie grecque concernent la famille des Atrides. Les noms d’Agamemnon, de Ménélas, de Clytemnestre, d’Iphigénie, d’Égisthe ou d’Oreste sont immortalisés depuis l’Antiquité sur fond de violence, d’infanticide, de vengeance et de guerre dans des récits où règnent les dieux de l’Olympe. Parmi eux, L’Orestie est une œuvre d’Eschyle, l’un des trois grands auteurs de tragédie de la Grèce antique : datée du Ve siècle avant J.-C., L’Orestie est la seule trilogie dite liée, c’est-à-dire développant une intrigue continue dans les trois tragédies, qui soit parvenue jusqu’à nous. Le destin tragique du jeune Oreste se façonne tout au long des trois pièces : Agamemnon, tué par son épouse Clytemnestre pour avoir sacrifié leur fille Iphigénie à la demande de dieux dont il avait provoqué la colère, est à son tour vengé par leur fils Oreste. Devenu matricide, celui-ci fuit la vengeance des hommes ; il sera jugé et acquitté par un tribunal convoqué par la déesse Athéna. Cet arbitrage met fin à la fatalité qui pèse sur la famille des Atrides.

À maintes reprises étudié au fil des siècles, le texte d’Eschyle, très difficile d’accès, a peu à peu livré des clés de compréhension et d’interprétation qui ont nourri la réflexion de Michel Fartzoff, professeur de langue et littérature grecques à l’université de Franche-Comté, chercheur à l’ISTA. Son analyse poussée du texte original et des commentaires qui en ont été faits ensuite ont abouti à la rédaction de son ouvrage Famille et cité dans l’Orestie d’Eschyle. Spécialiste de la tragédie grecque, Michel Fartzoff prend le contrepied de la vision traditionnelle, qui interprète la narration comme le passage de la justice familiale à celle de la cité ; il montre au contraire comment histoire familiale et rôle de la cité, au sens d’organisation politique, sont imbriqués dans toute la construction du récit. Une construction complexe, qui, au-delà de son intérêt littéraire indiscutable, représente un témoignage des rapports politiques et sociaux prévalant à l’époque antique, transcrits par le biais du destin d’une famille.
Michel Fartzoff a reçu pour cet ouvrage le prix Ambatielos 2019 de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, qui récompense des travaux de recherche en lien avec ses domaines de prédilection, dont l’Antiquité fait bien sûr partie.

Fartzoff M., Famille et cité dans l’Orestie d’Eschyle. La Trame du tissu tragique, Éditions Les Belles Lettres, 2018

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