Inviter un patient à prendre son traitement régulièrement, éviter une radio ou une prise de sang déjà faites par ailleurs, anticiper l’urgence qui mène à l’hôpital : le souhait d’améliorer la prise en charge des patients atteints de maladie chronique nécessite de faire converger informations et prises de décisions vers une personne ressource à l’intérieur du système de santé. Si le médecin généraliste semble le plus légitime pour occuper cette position centrale, son emploi du temps surchargé et une durée de consultation contrainte rendent cette tâche difficile, voire impossible à mener à bien.
La solution préconisée par le projet INTERMED est de recourir à la collaboration d’infirmières et d’infirmiers spécialisés dans l’accompagnement et l’éducation thérapeutique des patients. En marge de la consultation médicale proprement dite, la consultation infirmière se déroule sous la forme d’entretiens : l’accent est mis non plus sur la maladie mais sur la personne, sa situation personnelle, la façon dont elle vit, dont se passent ses journées… C’est à partir de ces échanges privilégiés que les priorités sont établies, en lien avec le médecin : une demande de prise en charge à domicile ou le recours à une aide de quartier, l’organisation de séances d’éducation thérapeutique, une coordination des soins plus efficace… Inspiré du Chronic Care Model testé dans d’autres centres médicaux, aux États-Unis notamment, le dispositif concerne tous les types de maladies chroniques, insuffisances cardiaques ou respiratoires, maladies cardiovasculaires, rhumatismales, digestives ou psychiatriques, cancers, démences… « Près de la moitié des patients rencontre des difficultés en raison d’une situation personnelle compliquée, divorce, chômage, ou parce qu’ils sont atteints de plusieurs pathologies chroniques. 5 % d’entre eux sont en situation complexe, voire critique : ce sont à ces patients que le programme s’adresse en priorité », raconte Olivier Walger, enseignant-chercheur en sciences infirmières à la Haute Ecole Arc Santé, et chef du projet de recherche INTERMED.
Différentes expérimentations sont menées dans les cantons de Vaud et de Neuchâtel, comme à la Chaux-de-Fonds depuis 2014 ; l’intervention de la Haute Ecole Arc Santé, elle, a démarré en 2017 pour quatre ans. L’équipe dirigée par Olivier Walger a pour missions principales, à travers une recherche-action participative, de réaliser des évaluations auprès des patients et des médecins, et d’émettre des recommandations pour le développement du modèle à partir des retours du terrain. « Les patients se sentent écoutés, compris et soutenus. Le médecin voit plus de sens à ce qu’il fait, et l’infirmier ou l’infirmière se sentent valorisés dans leur travail. » Mais bien que l’expérience soit prometteuse, le projet aura encore à faire les preuves de sa pertinence, en termes de réduction des coûts, pour espérer voir ce nouveau modèle de soins s’intégrer au système de santé suisse.
