Université de Franche-Comté

Géométrie de catégories et applications quantiques

La miniaturisation des composants électroniques sur puce silicium garantit une puissance toujours plus grande aux ordinateurs. Elle ne saurait cependant se poursuivre sans tomber sous le coup des lois de la mécanique quantique, régissant le monde de l’infiniment petit. Une limite physique qu’il serait possible de dépasser en mettant à profit les lois quantiques pour bâtir une technologie de substitution à la technologie du silicium. Des recherches prometteuses, mais encore balbutiantes…


Dans ce contexte, l’étude du contrôle des systèmes quantiques soumis à l’influence de leur environnement, un phénomène appelé décohérence, est plus confidentielle encore. Deux chercheurs de l’Institut UTINAM ouvrent la voie de la réflexion vers des pistes novatrices, utilisant des outils de géométrie encore méconnus.

 

 

À l’échelle de l’atome, les lois physiques classiques sont balayées par celles de la mécanique quantique, aux conceptions totalement discordantes. Dans le monde de l’infiniment petit, un même objet peut à la fois être une chose et son contraire, se trouver dans une superposition d’états aussi antinomiques que la vie et la mort. Si de tels dogmes bouleversent notre imagination, ils révolutionnent aussi nos technologies, l’idée étant d’utiliser plutôt que subir les règles qu’ils imposent. L’ordinateur quantique, un rêve caressé par la communauté scientifique, en est une parfaite illustration.

 

Fonctionnant grâce à la technologie du silicium, les ordinateurs actuels développent une puissance d’autant plus grande que les composants électroniques sont petits. Mais la miniaturisation des composants arrive à ses limites, que les spécialistes appellent « le mur », face auquel nous devrions nous trouver dès 2015.

 

À cette date fatidique, les composants auront atteint la taille critique de 50 nanomètres : en-dessous de ce seuil, la physique classique ne fait plus loi. D’où l’idée des physiciens théoriciens de considérer l’informatique sous un nouveau jour, et de tenter de remplacer la technologie du silicium par la technologie quantique dans la mise au point des ordinateurs.

 

« Les calculs ne seraient plus réalisés par des circuits de composants électroniques, mais directement par des molécules, des atomes ou même des spins, sortes de boussoles accrochées à une particule élémentaire comme l’électron » explique David Viennot, enseignant-chercheur en physique théorique à UTINAM.

   

Objets quantiques : ne pas toucher !

Dans l’absolu, l’ordinateur quantique cumule les atouts : puissance décuplée, calculs d’une rapidité inégalée avec des ressources minimales, supports de stockage réduits. Mais à d’aussi infimes échelles, la moindre perturbation sème la panique et désorganise complètement les systèmes. Ce phénomène dit de décohérence, regroupant tous les effets liés à leur environnement, empêche toute manipulation ou tentative de contrôle des objets quantiques, et donc l’accès à l’information qu’ils détiennent.

 

« Il est impossible de supprimer la décohérence, explique José Lagès, également enseignant-chercheur en physique théorique à UTINAM. Il convient de faire avec, d’imaginer des calculs qui anticipent et prennent en compte cette contrainte pour arriver malgré tout au but recherché. »

 

La géométrie de catégories, une théorie mathématique encore à l’aube de son existence, est pour les chercheurs d’UTINAM la voie à suivre pour s’affranchir du phénomène de décohérence. Cette géométrie pionnière fait émerger des objets qui n’étaient encore pas concevables en mathématiques. La méthode proposée peut être imagée par la construction d’un LEGO®. La décohérence bloque l’assemblage des briques envisagé au départ. La géométrie de catégories contourne le problème en inventant des façons extravagantes de combiner les éléments. L’emboîtement des pièces, s’il est différent d’un agencement classique, permet néanmoins d’atteindre le but recherché et de réussir la construction. De la même façon, la géométrie de catégories constitue le moyen de contrôler l’information quantique en présence du phénomène de décohérence.

 

La recherche menée à UTINAM a fait l’objet d’une première publication scientifique en 2011. Elle devrait se compléter dans les prochains mois d’un article consacré à la description de premières expérimentations.

 

 

Contact : David ViennotJosé Lagès

Institut UTINAM

Université de Franche-Comté / CNRS

Tél. (0033/0) 3 81 66 69 16 / 66 67

 

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