Université de Franche-Comté

En route vers une révolution des transducteurs piézoélectriques ?

Une technique à l'étude : l'assemblage moléculaire

Les moteurs piézoélectriques se prêtent mieux à la miniaturisation que les moteurs électromagnétiques, qui voient leur ren- dement chuter avec celle-ci. Malgré tout, dans les moteurs piézoélectriques, les pertes les plus sévères interviennent aux interfaces de transformation d'énergie, de l'énergie électrique en énergie de vibration, puis en énergie de déplacement de la partie mobile (rotation du rotor dans le cas d'un moteur rotatif). L'Institut Pierre Vernier, fort de ses savoir-faire tant en piézo-électricité (venant du Temps-fréquence) qu'en actionneurs et capteurs, entend bien réduire ces points noirs en proposant une nouvelle façon d'assembler les composants pour concevoir des micromoteurs : l'adhésion moléculaire. Cette technique a en outre l'avantage — loin d'être négligeable — de s'adapter à la production en série, et donc à l'industrialisation des processus.

 

 

L'adhésion moléculaire n'est pas en soi une technique révolutionnaire. Elle fait partie du panel de technologies utilisées pour la haute fréquence qui, contrairement au domaine des actionneurs ou des capteurs, fonctionnent avec des matériaux piézoélectriques, certes, mais avec un couplage faible.

 

L'avènement de matériaux céramiques (PZT) dans les années 60, tirant profit de leurs remarquables propriétés ferroélectriques, qui sont quelque cent fois plus « piézoélectriques » que le quartz, et peuvent donc produire un fort couplage, a ouvert la porte à la conception, via des transducteurs, d'actionneurs miniaturisés ou de micromoteurs. En effet, l'énergie électrique apportée au système est transformée en un mouvement amplifié grâce à l'assemblage du matériau piézoélectrique sur un support aux propriétés élastiques déterminées.

 

Les rendements de ces transducteurs, dont le facteur limitant est souvent le nombre de niveaux de transformations de l'énergie, peuvent encore être améliorés. Le premier facteur est la recherche de nouveaux matériaux et le second la qualité de l'assemblage. En proposant une nouvelle solution d'assemblage, l'adhésion moléculaire, c'est sur celui-ci que l'Institut Pierre Vernier entend agir. Traditionnellement, et faute de mieux, l'assemblage du piézoélectrique sur le substrat se fait par l'intermédiaire de colle. Or, les colles peuvent être particulièrement molles et absorber toutes les vibrations que l'on tente de transmettre. De plus, la difficulté consiste aussi à maintenir une liaison électrique entre les deux composants. Malgré tout, des solutions ont été trouvées dans les années 90, notamment par le département Développements technologiques de l'IPV (alors département Microtechniques du CETEHOR) dans le cadre d'un projet mené avec l'INSA de Lyon. Mais elles se révèlent par trop artisanales et ne peuvent être utilisées en production industrielle. De plus, de tels assemblages limitent les épaisseurs des matériaux piézoélectriques à des couches minimum de quelques centaines de micromètres.

 

 

Lame mince piézo 

 

Technologie de report amincissement de ferroélectriques

 

 

L'adhésion moléculaire

L'adhésion moléculaire n'utilise pas de colle ou d'agents tiers pour assurer l'assemblage entre deux pièces. Lorsque deux surfaces sont très fines, particulièrement bien polies, des forces de van der Waals se créent entre les structures moléculaires. Dans le cas qui nous occupe, les surfaces préalablement polies sont recouvertes d'une fine couche métallique de quelques centaines de nanomètres. C'est entre les deux couches métalliques, celle du matériau piézoélectrique et celle du substrat, que la liaison se fait. En imposant ensuite une pression élevée et en chauffant, des liaisons intermétalliques se créent avec migration des atomes. Ainsi, il devient possible d'assembler des transducteurs piézoélectriques avec une grande précision et une très grande cohésion mécanique. Après cette opération, le matériau piézoélectrique peut, de plus, être aminci jusqu'à des épaisseurs submicroniques. Ces technologies, dites de « report – amincissement », permettent une amélioration considérable de toutes les familles de composants piézoélectriques. Parmi les principaux avantages, il faut citer la diminution des tensions d'alimentation vers les standards de l'électronique (de l'ordre de la dizaine de volts), la montée en fréquence pour les capteurs et les énormes possibilités de miniaturisation. De plus, elles constituent la voie la plus appropriée à l'utilisation de nouveaux matériaux monocristallins cinq fois plus performants que les meilleurs PZT actuels, et qui vont, à terme, les remplacer. Les possesseurs de ces technologies en auront le monopole.

 

 

Une technologie compatible avec les technologies « salle blanche »

L'utilisation de cette technologie pour les assemblages de transducteurs piézoélectriques ouvre la voie à tout un champ d'applications pour le moment interdit. Des transducteurs, donc des micromoteurs et actionneurs, des microcapteurs piézoélectriques, de la taille de MEMS. À l'instar du projet Lacuson — labellisé par le Pôle des Microtechniques — qui projette la réalisation d'un microactionneur intégré dans la famille des MEMS, fabriqué en salle blanche. Miniaturiser la micropince du département AS2M — Automatique et systèmes micromécatroniques — de FEMTO-ST, réalisée jusqu'à ce jour dans une céramique granuleuse de type PZT, et donc difficilement intégrable, devient désormais possible.

 

De même, la diminution des tensions et l'augmentation des rendements rendraient possibles certaines applications de l'ingénierie biomédicale, notamment pour la microrobotique à usage intracorporel. Quel moteur utiliser pour une capsule intestinale censée se mouvoir de façon autonome, parfois à contre-courant, sachant que les moteurs électromagnétiques chauffent à 80°C en 30 secondes, ce qui est largement incompatible avec le corps humain ? C'est la question que se pose le projet européen VECTOR, financé dans le cadre du 6e PCRD.

 

Plus globalement, partout où la piézoélectricité est utilisée, cette technique d'assemblage moléculaire des transducteurs peut se révéler précieuse pour miniaturiser encore les composants et donc les appareils.

 

 

Moteurs piézoélectriques miniatures diamètre 5 mm

 

 

Contact : Christophe Roux

Développements technologiques

Institut Pierre Vernier

Tél. (0033/0) 3 81 40 57 08

 

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