Université de Franche-Comté

Émoi sur le concours de chefs d’orchestre de Besançon

Photo Pixabay

De l’indifférence au frisson musical, tout un registre d’émotions parcourt une salle lors d’un concert. Des sensations se diffusant dans le public, s’insinuant entre les musiciens et l’auditoire. Quels mécanismes neurophysiologiques sont à l’œuvre dans la propagation de l’émotion quand elle est collective ? C’est le mystère que Thibaut Chabin tente de percer dans sa thèse menée au Laboratoire de neuro­sciences intégratives et cliniques de l’université de Franche-Comté, par une investigation conduite sur le terrain : le concours de jeunes chefs d’orchestre qui traditionnellement prend place lors du Festival international de musique de Besançon. Une expérience pour laquelle des volontaires ont accepté de livrer leurs émotions via des électrodes et des capteurs placés sur leur tête, leurs mains et/ou leurs pieds. Les premières transmettent par bluetooth des enregistrements de l’activité électrique cérébrale, les seconds mesurent l’activité électrodermale indiquant les variations du système nerveux autonome et du rythme cardiaque, révélatrices de l’émotion. C’est donc munis de cet arsenal qu’une quarantaine de spectateurs et musiciens ont investi le Kursaal de Besançon les 17 et 18 septembre 2019. Chaque participant disposait également d’un smartphone doté d’une application permettant de noter en continu l’intensité des émotions ressenties, pour une future analyse comparative avec les indices neurophysiologiques. « L’objectif est de comprendre ce qui se passe dans un groupe et dans un environnement particulier, explique Thibaut Chabin. Et mener l’expérience en conditions naturelles revêt toute son importance, car il est difficile de reproduire et de simuler en laboratoire la complexité d’un environnement naturel pour l’étude des interactions humaines ; cela peut mener parfois à des résultats contradictoires ». Les participants se sont prêtés au jeu autour des mêmes extraits musicaux, interprétés par les mêmes musiciens, mais dirigés par différents chefs d’orchestre. « Il ne s’agissait pas de mesurer l’émotion ressentie à l’écoute d’une œuvre elle-même, mais bien de celle qui passe entre un chef d’orchestre, un ensemble musical et le public. » Il va sans dire que ces ressentis n’ont aucunement été pris en compte par le jury pour évaluer les prestations !

Deux ans de préparation ont été nécessaires pour mettre au point cette expérience, la récupération de signaux de fréquence très élevée et le traitement de l’information se révélant être de véritables défis techniques. La musique en revanche représente un terrain d’études idéal, car elle déclenche facilement des émotions, aidant ainsi leur prise de mesures. Grâce à cette expérience, une meilleure connaissance des processus neurophysiologiques impliqués dans la synchronisation de groupe pourrait ensuite être mise au service de publics en difficulté, comme les personnes autistes, ou utilisée dans le cadre de l’évaluation de la conscience de patients en état végétatif à l’hôpital, lorsque les tests classiques ne peuvent saisir les émotions qu’ils ressentent. Cette étude a été soutenue par le Laboratoire de neurosciences de l’université de Franche-Comté, l’INSERM, le CHU de Besançon et la Région Bourgogne – Franche-Comté.

Contact(s) :
Laboratoire de neurosciences intégratives et cliniques - UFC
Thibaut Chabin
Tél. +33 (0)3 81 21 85 31
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