Université de Franche-Comté

Découpe laser pour écrans impeccables

Un écran parfaitement découpé et poli sur tranche ? La technologie du laser femtoseconde est sans conteste celle qui s’acquitte le mieux de cette mission. Aujourd’hui opérationnelle dans le monde industriel, elle reste l’objet de nombreuses recherches menées au département Optique de l’Institut FEMTO-ST.
François Courvoisier et son équipe sont les premiers, au niveau mondial, à avoir maîtrisé la découpe par laser femtoseconde, qui consiste à percer côte à côte des milliers de trous de très haut rapport de forme pour que se casse le verre d’une façon nette et sans bavure le long de ces pointillés. Le rapport de forme atteint la valeur phénoménale de 1 000, voire 10 000, pour 1 : les canaux obtenus affichent plusieurs centaines de µm de profondeur pour un diamètre de 100 nm, l’équivalent d’un tunnel de 10 à 100 km de long pour 10 m de diamètre. Le tout percé en une seule fois, grâce à une seule impulsion laser, qui en une centaine de femtosecondes concentre une puissance comparable à celle de plusieurs centrales nucléaires réunies. Rappelons qu’une femtoseconde représente 10- 15 s.

Verre cassé par stress interne

Les industriels ne s’y sont pas trompés, qui se sont équipés de lasers femtoseconde puissants et performants, leur permettant d’assurer la découpe du verre à une vitesse de l’ordre du mètre par seconde. « L’impulsion laser donne naissance à un plasma, qui à son tour génère une pression et une température telles que le verre explose, explique François Courvoisier. C’est donc un stress interne qui fait que le verre se casse, se clive par lui-même : le contrôle des interactions entre laser, plasma et matière est capital. » Les chercheurs continuent, eux, à peaufiner le procédé. À FEMTO-ST, ils ont par exemple mis au point de nouvelles formes de lasers pour le perçage de canaux elliptiques. Grâce à cette « astuce » géométrique, le stress provoqué à l’intérieur du matériau est plus important, et surtout génère une cassure suivant exactement la ligne de perçage, ce qui n’était jusque-là pas maîtrisé de façon systématique. Cette fracture, provoquée pile au bon endroit, garantit une plus grande solidité du verre, tout en continuant d’assurer une découpe et une finition parfaites.

Prestigieux financement européen

Mais si la technologie continue de faire ses preuves, il n’en reste pas moins que certains principes physiques à l’œuvre restent obscurs, même pour les chercheurs qui l’ont mise au point. Pour mieux les comprendre, et de là avancer dans un domaine aux enjeux majeurs, l’équipe menée par François Courvoisier s’est vue accorder un prestigieux financement européen de l’ERC (European Research Council), de l’ordre de deux millions d’euros sur cinq ans. Le projet arrive aujourd’hui à mi-parcours, et les chercheurs attendent beaucoup de l’expérience qu’ils ont mise au point, une infrastructure qui leur a demandé deux années de travail pour pouvoir répondre à un questionnement complexe. « Le piège est prêt ! Il nous permettra de mettre en évidence les processus en jeu, qui tiennent de différents aspects de la physique, quantique, thermodynamique, mécanique, acoustique, des plasmas… » Et de mieux maîtriser de nouveaux développements, notamment d’autres applications spécifiques à la microélectronique. Un projet concerne par exemple le perçage de « sandwichs » composés de verre et de silicium. De tels empilements de couches incluant des semi-conducteurs, reliées entre elles par de la connectique, seraient utiles pour l’alimentation électrique de différents composants d’un portable.

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